Abolis voici 233 ans, les privilèges du haut clergé sont-ils rétablis ?

Stupeur dans le clergé après une nouvelle affaire de violences sexuelles sur mineurs. Pourtant, ces agissements sont connus et dissimulés depuis plusieurs années.

Le cardinal Jean-Pierre Ricard (Photo AFP)
Par Michel Sérac
Publié le 20 novembre 2022
Temps de lecture : 2 minutes

« Terrible violence », « sentiment intense de trahison », « mensonges cumulés » : la présidente de la Conférence des religieux de France exprime la sidération des catholiques après la mise en cause de deux cardinaux et dix évêques dans des scandales de violences sexuelles1Interview de Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France, à La Vie (revue catholique), 7 novembre 2022..

Deux fois élu chef de l’Eglise de France, le cardinal Ricard, impliqué, enfonce celle-ci dans la « ruine morale », dit un prélat. Les actes du cardinal Santier, forçant de jeunes hommes à se dénuder durant la confession, venaient déjà de mener la Conférence des évêques « au bord du gouffre » (Libération).

Après la stupeur suscitée par le rapport Sauvé, dénombrant 216 000 victimes des prédateurs du clergé, le ministre Dupond-Moretti diffusa une étrange circulaire : les procureurs devaient signer avec les évêques des protocoles engageant ceux-ci à transmettre les « signalements d’infractions sexuelles » connus d’eux2Compte rendu par France 3 Bretagne de la signature,  le 8 juin dernier, d’un protocole entre cinq évêques et neuf procureurs..

Question de démocratie n° 1 : si ces protocoles désignent l’Eglise comme repaire de prédateurs sexuels, ils l’officialisent en même temps comme autorité constituée, comme sous l’Ancien Régime !

Question de démocratie n° 2 : la chronologie montre que, pendant la signature de ces « protocoles » avec la justice, l’épiscopat dissimulait et étouffait les scandales ! Il en fut empêché par les victimes3Les parents de la victime du cardinal Ricard (14 ans au moment des faits), apprenant que ce dernier était chargé par le pape d’enquêter sur les abus sexuels dans les Foyers de charité (!), ont dûment signalé ses agissements à l’évêque de Digne, en février 2022. L’Eglise a fini par révéler les faits huit mois plus tard. Pour Santier, Moulin-Beaufort, président de la Conférence des évêques, reconnaît : « Au printemps 2019, deux personnes victimes parlent », et ce n’est qu’en septembre 2022 que le scandale des « strip-confessions » est connu, par des sources externes au clergé (notamment l’association catholique #sortons les poubelles)..

Pour capter les voix catholiques, Macron a revendiqué du pape le titre, réservé aux rois de France, de chanoine de Latran. Est-il en droit, en contrepartie, de rétablir des privilèges féodaux du clergé abolis le 4 août 1789 par le peuple français ?