La réforme des retraites « indispensable » ?
Le gouvernement prétend que la réforme des retraites serait « indispensable ». C'est un mensonge ! Et nous le prouvons.
- France, Retraites

Elisabeth Borne a déclaré le 10 janvier : « C’est un vrai sujet de société pour nous, de reconnaître la place des seniors. »
– Le but de la réforme n’est pas de faire travailler plus mais de payer moins. Dans l’exposé des motifs de l’article 4 qui reporte l’âge de départ, le gouvernement précise que les réformes antérieures ont permis de faire 22,9 milliards d’économies entre 2010 et 2019. C’est ce programme qui continue.
– Non, le gouvernement ne veut pas nous faire travailler. Le taux d’emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans était en 2021 de 56 % (contre 71,8 % en Allemagne). Sur 10 salariés de cette tranche d’âge, 5 travaillent, 3 sont au chômage, 2 sont au RSA ! En 2021 et 2022, Michelin a supprimé 1 100 emplois dont 60 % en préretraite. 1 500 départs en préretraite chez Airbus. 1 000 sur les 1 231 postes supprimés par TotalEnergies. Le but du capitalisme que défend le gouvernement, ce n’est pas le travail, le but c’est le profit. Le « plein emploi » de Macron, c’est de la propagande pour augmenter les profits.
« Une mesure de justice, d’équilibre et de progrès », notamment envers les femmes, dit la Première ministre.
C’est l’inverse qui est vrai, voici les faits.
– Pourquoi les femmes ont-elles des pensions plus basses ?
Parce qu’elles ont plus de mal à avoir leurs trimestres (les trimestres non cotisés représentent entre un quart et un cinquième des durées validées pour les femmes) et parce qu’elles ont des salaires plus faibles (temps partiel). Résultat ? Alors que, souvent, elles commencent à travailler plus tôt, elles partent plus tard et avec des retraites plus basses. Il y a un lien entre les deux : pour augmenter la pension, certaines jouent sur la surcote qui disparaît avec le projet de Borne.
– Les inégalités de genre se répercutent jusqu’à la retraite, où les femmes touchent 40 % de moins que les hommes. En 2019, la pension moyenne brute pour les retraités vivant en France s’est élevée à 1 924 euros pour les hommes, contre 1 145 euros pour les femmes. Certes, avec l’augmentation de l’activité salariée et de la qualification des femmes, l’écart se resserre au fil des années (il était de 50 % il y a vingt ans), mais très lentement et sans garantie qu’il se résorbe mieux que l’écart des salaires (environ 20 %). Les carrières hachées par des arrêts ou des emplois à temps partiel – occupés à 80 % par des femmes – sont particulièrement pénalisées.
– Concernant le relèvement du minimum de pension à 1 200 euros par mois, il est réservé aux carrières complètes. Or, dans la génération 1950, 44 % des femmes sont parties à la retraite avec une carrière incomplète, contre 32 % des hommes.
Elisabeth Borne : « Il y a des avancées, il y a des mesures de justice, il y a des progrès. »
Elle ajoute : « On tient compte des situations de ceux qui ont commencé à travailler tôt et (…) on améliore la prise en compte (des) métiers difficiles. On fait beaucoup de prévention de l’usure professionnelle, on a des avancées sur le niveau des pensions, pour les futurs retraités, pour les retraités actuels. »
– Tous les salariés nés après le 1er septembre 1961 seraient touchés.
Ceux qui devaient partir le 1er septembre ont 62 ans au moins (ou 60 ans s’ils ont commencé à travailler avant 20 ans). Ils ont 42 ans de carrière. Pour rappel, s’il manque un trimestre, le taux est diminué de 1,25%. Et ce, si vous prenez votre retraite avant… 67 ans. L’âge d’annulation de la décote ne change pas. Pour le moment…
– Avant la réforme de l’assurance chômage, les chômeurs de plus de 55 ans avaient droit à 36 mois d’indemnisation. Cette durée pouvant être prolongée pour ceux qui ne pouvaient liquider une retraite à taux plein et ce jusqu’à l’âge de suppression de la décote : 67 ans.
La réforme de l’assurance chômage réduit de 25 % les durées et les montants. Pour bénéficier de sa retraite à taux plein, il faudra avoir travaillé 43 ans en 2027 et être âgé, à la même date, de 63 ans et 3 mois (génération 1963). Avec les règles d’aujourd’hui, on peut partir en 2027 à 62 ans, avec 42 annuités plus 1 trimestre.
– Des salariés qui ont commencé à travailler avant 20 ans peuvent, encore maintenant, bénéficier du dispositif « carrières longues ». Avec Borne, pour partir à 60 ans, il faudra maintenant, quand on a commencé à travailler avant 18 ans, avoir 44 ans de cotisations ! Ceux qui ont commencé à travailler entre 18 et 20 ans, pourront partir à 62 ans avec 43 ans de cotisation.
« Comme on vit plus vieux, on peut partir à la retraite plus vieux », nous disent-ils
– C’est ce que dit aussi l’OCDE : « L’allongement de l’espérance de vie devrait, au moins en partie, être compensé par le relèvement de l’âge légal de la retraite. » L’espérance de vie lorsqu’on a 62 ans est de 23 ans en France contre 17 ans en moyenne européenne. Précisément parce que les Français partent plus tôt en retraite !
Bien évidemment, l’espérance de vie reflète la nature de notre société capitaliste : Pour les 5 % les plus riches, l’espérance de vie est de 84,4 ans pour les hommes alors qu’elle est de 71,7 ans pour les 5 % les plus pauvres (chiffres INSEE) soit un écart de 13 ans. On a bien compris à qui cela profite.
– L’espérance de vie en bonne santé est de 63,7 ans pour les hommes et 64,6 ans pour les femmes.
La question des régimes spéciauxLe Conseil de l’Union européenne a recommandé à la France, en 2019, de « réformer le système de retraite pour uniformiser progressivement les règles des différents régimes de retraite, en vue de renforcer l’équité et la soutenabilité de ces régimes ». L’article 1er du projet de loi porte sur la fermeture des régimes spéciaux : IEG, RATP, CRPCEN, Banque de France, CESE. Sébastien Menesplier (Fédération CGT Mines et Energie) parle de régimes « pionniers ». En 1945, qu’est ce qui existait ? Les régimes conquis par la lutte : mineurs, cheminots, fonctionnaires, RATP. En 1946, arrive celui d’EDF. Ces régimes ont établi des prestations définies, des salaires de remplacement (dernier salaire), la reconnaissance de métiers pénibles (catégorie que la réforme de Mme Borne veut faire travailler 2 ans de plus). Nos droits, en matière de retraite, viennent des régimes dits spéciaux. Pourquoi ont-ils été gardés en 1946 ? Ils ont demeuré tant que le régime général n’assurait pas les mêmes avantages. C’est toujours le cas. En 2019, 79,3 % des salariés des régimes spéciaux sont partis en retraite avant 60 ans contre 13,1 % des salariés du privé. |
