Quatre questions à Michel le Roc’h, secrétaire général de l’UD CGT-FO de Loire-Atlantique

« Le mépris affiché par Macron ne nous laisse pas d’autres solutions que la grève et sa reconduction partout. Alors il y a la date du 15 mars, allons-y et continuons la grève le 16, le 17 », assure Michel Le Roc'h.

Le secrétaire général de l'union départementale CGT-FO de Loire-Atlantique, Michel Le Roc'h, au micro (photo FO 44)
Par la rédaction d'IO
Publié le 14 mars 2023
Temps de lecture : 4 minutes

Depuis deux mois se développe une formidable mobilisation pour le retrait de la réforme Macron des retraites, quelle est ton appréciation ?

Michel Le Roc’h : Le front uni des confédérations sur des revendications clairement délimitées a été un puissant levier pour la mobilisation et la grève. Nous ne voulons pas du report de l’âge légal à 64 ans ni de l’allongement de la durée de cotisation à 43 ans.

Depuis près de deux mois, par millions, les salariés, les jeunes et les retraités expriment avec détermination leur rejet de la réforme des retraites du président de la République et du gouvernement. Aujourd’hui 94% des actifs se déclarent opposés à un recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans et à l’allongement de la durée de cotisation.

Ces mobilisations exceptionnelles ont fragilisé le gouvernement, mais celui-ci s’obstine et continue à mépriser la majorité du pays, avec des propos mensongers et des trucages sur le contenu de la réforme (la situation des femmes, les 1200 euros, les carrières longues, la pénibilité, les régimes spéciaux…).

On pourrait écrire un livre avec de nombreux chapitres pour recenser tous les mensonges éhontés, les trucages, les contre-vérités, les manipulations commis par les ministres et sous-ministres et répétés sur tous les médias à longueur de journée. La palme revient certainement à Dussopt avec ses déclarations sur la « réforme de gauche ».

Les journées de grève et manifestation se sont succédées, nous en sommes à six me semble-t-il. Elles ont permis à l’ensemble des salariés de prendre confiance, de mesurer leur force et leur détermination qui sont très grandes.

Tu as lu la réponse de Macron aux secrétaires généraux des confédérations ?

Oui, c’est un bras d’honneur ! Le président de la République n’entend même pas accéder à la demande des organisations syndicales d’être reçues en urgence.

Dans son courrier, il exprime son attachement au dialogue, il en rajoute même sur la place et le rôle du débat parlementaire, et dans le même temps, Dussopt déclenche un « vote bloqué » au Sénat !

Cela pose clairement un problème de démocratie. Macron est minoritaire dans le pays et il passe en force en utilisant tous les mécanismes que prévoient les institutions de la 5ème République.

Macron nous parle des débats antérieurs à son projet, il parle des « concertations » mais il oublie de dire que toutes les confédérations, toutes, lui ont sans cesse répété qu’elles refusaient l’allongement de la durée de cotisation et le report de l’âge légal à 64 ans. Il est cynique et se moque du monde.

Que manque-t-il pour gagner ?

Il y a une rage de vaincre. Le 7 mars, nous avions décidé de mettre la France à l’arrêt et de monter d’un cran et nous l’avons fait. Les salariés ont répondu massivement à l’appel des confédérations.

Chez nous, il y avait 60 % de grévistes à Manitou, 80 % à Quo-Vadis, 93% à Cordemais pour ne citer que ces deux entreprises et la centrale thermique. Sur ces sites, la grève a été reconduite le 8 mars.

L’importance des ouvriers et salariés du privé dans les cortèges, en particulier de la métallurgie et de l’industrie en général n’a échappé à personne que ce soit à Ancenis, Nantes, Saint Nazaire ou ailleurs.

Mais les journées de grève et de manifestation, aussi puissantes soient-elles, ne permettent pas de gagner face à un gouvernement minoritaire qui nous ignore et utilise tous les artifices de la Constitution pour faire passer sa loi.

Il n’y a rien à négocier donc seule la grève généralisée par la reconduction jusqu’au retrait peut nous permettre de bloquer l’économie et donc de gagner. Les secteurs et sites stratégiques déjà en grève et bloqués doivent être rejoints par tous les autres secteurs.

Comment vois-tu la suite ?

Lors de la réunion intersyndicale départementale vendredi, la nouvelle journée d’action du 15 mars a été évoquée. J’ai rappelé que nous étions un certain nombre à avoir proposé une grève franche et continue les 7, 8 et 9 mars et que cela me semblait la bonne méthode pour gagner. La discussion se poursuit à tous les niveaux, localement et nationalement.

Mes camarades territoriaux de Nantes ont proposé cet après-midi aux autres organisations syndicales du secteur de soutenir les éboueurs (grève reconduite), mais également de préparer la grève le 15 mars avec l’objectif de la reconduire sur les autres sites de la communauté de communes. Nous allons proposer ces reconductions dans d’autres secteurs du département et au niveau interprofessionnel et nous ferons tout pour qu’elle soit adoptées.

Nous savons que Macron craint par-dessus tout le blocage économique du pays par la grève. Au niveau national, il appartient à l’intersyndicale de rester soudée et unie. Mais il lui appartient également de répondre fermement à Macron et surtout de répondre à l’attente des centaines de milliers de syndicalistes, et au-delà de la grande majorité de la population, qui soutiennent l’intersyndicale sans faille depuis le début parce qu’ils veulent gagner contre cette injustice.

De ce point de vue, je partage l’appréciation du secrétaire général de ma confédération sur la consultation citoyenne, ce n’est pas notre terrain. Par ailleurs, soyons sérieux, le point de vue de la masse des citoyens, il est connu, confirmé et reconfirmé par la grève et les manifestations et même par les sondages : plus de 90% des actifs ne veulent pas de cette réforme.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il n’y a pas la moindre animosité contre la grève malgré les difficultés qu’elle peut engendrer. Les centaines de milliers sont prêts et ils ont déjà commencé. C’est le moment !

Le mépris affiché par Macron ne nous laisse pas d’autres solutions que la grève et sa reconduction partout.

Alors il y a la date du 15 mars, allons-y et continuons la grève le 16, le 17. C’est la proposition de la confédération FO dans l’intersyndicale et nous allons la mettre en œuvre.

Propos recueillis le 11 mars