Accidents du travail : les patrons paieront moins
C'est un aspect peu connu de la réforme des retraites : non content de nous faire travailler deux ans de plus, le gouvernement profite de sa loi pour faire un cadeau de 800 millions d’euros au patronat.
- Actualité politique et sociale, Retraites

La réforme Macron s’attaque, dans les faits et dans l’immédiat, à toute la Sécurité sociale. Non content d’imposer, par les moyens antidémocratiques qu’on connaît, le démantèlement des garanties obtenues en matière de retraite, le gouvernement, sous couvert d’aménagement des dispositions meurtrières qu’il impose, profite de sa loi pour faire un cadeau de 800 millions d’euros au patronat par une baisse de leur cotisation accidents du travail.
En 2021, pour les seuls salariés du privé (statistiques de la Caisse nationale d’assurance maladie), 604 500 salariés ont été victimes d’un accident du travail. 645 salariés en sont morts. Enfin, il s’agit de ceux dont l’accident a été déclaré comme accident de travail ! Car des centaines de milliers ne sont pas déclarés par les employeurs. Oui, des centaines de milliers, selon les experts.
On est bien loin des discours lénifiants sur le « travailler mieux » ! On est bien loin des larmes de crocodile sur le dialogue social !
Le vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) l’explique (cité par L’Opinion, 27 avril) : « Quand la tarification varie en fonction de votre taux d’accidentologie, il y a une pression naturelle pour que les déclarations ne se fassent pas dans les bonnes conditions. »
Vous avez compris : dès lors que les cotisations sont calculées en fonction des accidents constatés, il est préférable de ne pas déclarer ! Cela coule de source !
Une conquête emblématique de 1945
L’intégration des accidents du travail1Jusque-là « indemnisés » par les assurances des patrons. à la Sécurité sociale est une conquête emblématique de 1945.
Dans la présentation qu’il en fit à l’Assemblée provisoire, en juillet 1945, le syndicaliste Georges Buisson explique : « La caisse unique s’impose parce que l’assurance du risque professionnel, en raison même de son caractère social, ne doit pas poursui vre des fins lucratives2Voir les Cahiers du Cermtri, n° 169.. » C’est clair !
« En raison de son caractère social », aucune cotisation pour les accidents du travail n’est prélevée sur le salaire ; seule la cotisation dite « employeur » est versée. Et elle varie selon les résultats de la politique de prévention.
Le délitement de la Sécurité sociale sous la pression des réformes successives, combiné avec la suppression des CHSCT, a comme conséquence que les employeurs ne subissent plus beaucoup de contraintes. Résultat ? Le nombre d’accidents ne diminue pas (et on ne parle que des déclarés) et, en particulier, les accidents mortels sont toujours aussi élevés.
Pendant ce temps, les excédents cumulés de la branche accidents du travail atteignent six milliards. Certains nous disent que c’est là le signe d’une bonne gestion ! Non. C’est le résultat du laxisme à l’égard des employeurs. Tous les jours, les salariés en font les frais.