Réunion publique contre la guerre à Saint-Denis (93)
Au lendemain du vote à l’Assemblée nationale de la loi de programmation militaire, le 11 juin, de nombreux travailleurs et jeunes se sont réunis à l’initiative de 5 militants et élus, membres de LFI, du POI, du Mouvement de la paix et syndicaliste, tous signataires de l’appel européen « Halte à la guerre ! ».
- Guerre

« Dans cette escalade guerrière, il y a des intérêts économiques colossaux »
Bally Bagayoko, chef de file LFI de Saint-Denis : « Au sein de LFI, nous sommes pour condamner l’action de l’Otan et pour que la France sorte de l’Otan, le bras armé d’une logique de va-t’en-guerre. Les peuples qui aspirent à vivre ensemble sont mis en guerre par des irresponsables politiques animés uniquement par des intérêts capitalistiques. On a une pensée pour la région du Sahel, la Syrie, Haïti, la Palestine…
Rappelons que la Russie fournissait 40 % du gaz de l’Europe. Les Etats-Unis, premier producteur en hydrocarbures, se battent pour de nouveaux débouchés. Le moteur de la guerre, en réalité, c’est l’affrontement que se livrent les monopoles impérialistes pour le contrôle des marchés et le pillage des matières premières.
Ne croyons pas que la paix sera le résultat d’une victoire militaire face à une puissance nucléaire ! Notre position pacifiste n’est pas un soutien au dirigeant russe, bien au contraire, mais ni un soutien aveugle au régime de Zelensky.
Nous savons très bien que les oligarques russes existent, mais qu’il existe aussi des oligarques ukrainiens. »
« Refuser l’union sacrée sous toutes ses formes »
Emma Greiner, syndicaliste dans l’enseignement en Seine-Saint-Denis : « Quand on est syndicaliste, on est forcément contre la guerre, a fortiori contre la guerre en Ukraine, qui est une guerre impérialiste. Dans mon organisation syndicale, la FSU, il y a beaucoup de discussions à ce sujet. « Il faut défendre le peuple ukrainien », nous dit-on. Oui, mais ce n’est pas la même chose que défendre le gouvernement ukrainien. Il faut aussi défendre le peuple russe, sans pour autant accepter d’être taxé de « pro-Poutine ». Zelensky est un oligarque qui, dès le début de la guerre, a mis en place toute une série de lois pour réduire les libertés et les droits syndicaux, qui a fait adopter la loi 5371 qui est une véritable destruction du Code du travail. (…)
Pour moi, la position qu’on doit avoir dans nos syndicats, c’est le refus de soutenir la guerre en demandant le cessez-le-feu immédiat, le retrait des troupes russes et de celles de l’Otan, l’arrêt des sanctions contre le peuple russe, et bien entendu aussi, le refus de la guerre sociale. (…)
Cette question de refus de la guerre et du refus de la guerre sociale, pour moi, c’est un seul et même combat : l’ennemi est bien dans notre propre pays.
Et la meilleure façon de se battre contre la guerre aujourd’hui c’est qu’on se regroupe sur nos intérêts de classe, qui sont à l’opposé de ceux des fabricants d’armes, des oligarques, des impérialistes. L’économie de guerre c’est très concret : les budgets de l’Education nationale et de la Santé subissent une baisse de 5,4 % pour la programmation militaire 2024-2027. Le repas à 1 € pour les étudiants a été jugé trop cher. Le coût c’était 90 millions, alors qu’il y a 413 milliards pour la guerre ! Cette guerre sociale s’attaque aussi directement à la jeunesse avec la loi sur l’enseignement professionnel mais aussi dans la volonté du gouvernement de généraliser le SNU. Le SNU c’est vraiment l’embrigadement de la jeunesse. Pour moi, le combat contre la guerre, en tant que syndicaliste, c’est d’abord maintenir la politique indépendante de classe et refuser l’union sacrée sous toutes ses formes. »
« La solidarité internationale est importante »
Silvia Capanema, conseillère départementale LFI de Seine-Saint-Denis : « Depuis le début c’est une évidence : on est dans la continuité de la lutte contre la guerre en Irak. Une guerre qui appauvrit tous les peuples, une guerre qui détruit aussi la planète. C’est moins d’argent, par exemple, pour les collectivités territoriales. J’ai été sensibilisée par la situation des Russes qui s’opposent à la guerre et qui sont exilés. Il faut leur apporter un soutien inconditionnel. Jean-Luc Mélenchon a apporté par exemple son soutien à la campagne pour la libération d’un universitaire russe opposant à Poutine. La solidarité internationale est importante. »
« Un grand pas dans l’entreprise de militarisation du pays »
Majid Wannass, responsable du Mouvement de la paix à Saint-Denis : « Il y a une paralysie de la diplomatie de paix ; elle n’a pas joué son rôle. Une guerre qui dure, c’est une guerre plus destructrice. (…) Plus la guerre sera longue, plus la reconstruction de l’Ukraine le sera aussi. Le coût de la reconstruction du pays est estimé à 383 milliards par la Banque mondiale. Ça équivaut à deux fois le PIB de l’Ukraine. Ce ne sera pas des aides : toutes les aides sont conditionnées. C’est un gros gâteau à partager.
La conférence de Genève a déjà posé les jalons sur ce partage-là. Le fait de décréter une économie de guerre, la volonté de créer une unité de réservistes, la volonté de généraliser le SNU et son encadrement par l’armée, c’est un grand pas dans l’entreprise de militarisation du pays.
Macron parle « d’une guerre en retard », mais il ne désigne pas celle de la transition énergétique, ni celle de la justice sociale. Sa « guerre en retard » bénéficiera aux marchands d’armes (…). Nous sommes face à une guerre pour un nouvel ordre mondial. Ce n’est pas une guerre entre deux Etats, c’est une guerre dont la finalité est de se positionner en tant que maître du monde. »
« Les livraisons d’armes, une voie pour la paix ? Non ! »
Jérôme Legavre, député LFI de Seine-Saint-Denis, militant du POI : Le gouvernement Macron – et il n’est pas le seul – nous explique qu’il n’y a d’autres solution que de livrer toujours plus d’armes (…). Dès qu’on s’interroge, on est instantanément accusé d’être des soutiens de Poutine (…). Ce diktat est absolument inacceptable.
Le 30 novembre dernier, une résolution a été présentée par deux députés Renaissance à l’Assemblée nationale, résolution dite de « soutien au peuple ukrainien », en réalité était une résolution belliciste. Elle demandait d’amplifier les sanctions contre le peuple russe, d’amplifier les livraisons d’armes et de renforcer la place de l’Otan. Les députés du PS, du PCF, d’EELV ont voté pour cette résolution, LFI s’est abstenue.
Pour ma part, j’ai voté contre, et si c’était à refaire, je le referais, et plutôt deux fois qu’une (applaudissements de la salle). Il faut constater quand même que les députés du PS, du PCF et d’EELV ont voté pour, pour le renforcement de la place de la France dans l’Otan, pour l’amplification des livraisons d’armes. Pourtant, même Henry Kissinger (ancien secrétaire d’Etat américain), un personnage au bilan sinistre, tire à ce sujet un signal d’alarme.
Quelle n’est pas ma surprise quand je constate que des responsables du NPA se prononcent pour des livraisons d’armes. Ils nous expliquent – et ils ne sont pas les seuls – que c’est la condition pour retrouver la paix. Non, c’est faux ! Ces grandes âmes qui nous expliquent que la voie de la paix, c’est le soutien au régime de Zelensky en lui livrant toujours plus d’armes. Est-ce que les mêmes, en 2003, quand l’impérialisme a envahi l’Irak, sur la base ce qu’on sait être un mensonge éhonté, pour piller ce pays et l’amener au chaos sanglant actuel, est-ce que ces grandes âmes nous ont dit alors qu’il fallait livrer des armes à Saddam Hussein ? Evidemment non, et avec raison.
Il y a des questions qu’on ne peut pas esquiver.
A qui livre-t-on des armes ? Je ne peux pas fermer les yeux sur la nature du régime de Zelensky. De même que Poutine, il est à la tête d’un clan d’oligarques mafieux, sur la base du pilage de l’Ukraine et de l’exploitation éhontée de sa population.
Et qui livre des armes ? Les gouvernements sous la tutelle de l’Otan. Le bilan de l’Otan c’est, ce sont les guerres au compte de l’impérialisme américain et de ses intérêts aux quatre coins du monde. Allez demander aux Irakiens s’ils pensent que l’Otan c’est la voie de la paix, de la liberté et des droits de l’homme.
Et cette guerre en Ukraine, ce sont des profits colossaux pour les grands groupes industriels de l’armement, qui ont intérêt à ce qu’elle dure encore et toujours ! La loi de programmation militaire de Macron, c’est 413 milliards d’euros sur 7 ans pour faire ça.
Nous ne sommes ni dans le camp de Poutine, ni dans le camp de l’Otan, ni dans le camp des gouvernements fauteurs de guerre et qui roulent pour les profiteurs de guerre. Oui, l’ennemi est dans notre propre pays, et l’ennemi c’est aujourd’hui le gouvernement de Macron. Ce combat de l’indépendance du mouvement ouvrier est absolument indispensable. L’issue viendra des travailleurs et des peuples contre les gouvernements qui les oppriment.
Entendu dans les échanges entre la salle et la tribune– Il y a toujours plus d’armes en circulation dans le monde. Par exemple, les armes utilisées dans les Balkans se retrouvent dans les quartiers ! – Y a-t-il des gouvernements contre la guerre en dehors de l’Occident ? – La renonciation à la diplomatie, c’est grave. Et c’est partagé par tous les gouvernements. Le corps diplomatique a été détruit par Macron. Chaque début de proposition de diplomatie a été rejetée. Certains évoquent le « respect des accords de Minsk », mais ils ont été faits pour ne pas être respectés ! – Il y a une forme de « révisionnisme » historique sur la place des Russes dans la libération des camps de concentration nazis. – L’action des dockers italiens contre les livraisons d’armes, c’est très important car ce sont les peuples qui ont la possibilité d’imposer la paix. – 413 milliards pour la guerre, en comparaison avec les 12 milliards de « déficit » des retraites, 35 fois plus ! Il y a des conséquences terribles sur l’hôpital public, il y a différentes réformes comme celle des lycée professionnels… Le repas à 1 € trop cher face aux 413 milliards, c’est insupportable ! On assiste à une tentative de militarisation de la jeunesse avec le SNU. – Manon Aubry, au Parlement européen, a voté pour le budget militaire. Est-ce une position commune de toute La FI ? – Merci pour l’unité. Halte à la guerre ! Vive la paix. Pas besoin d’armée. A Bruxelles, il va y avoir une « Rencontre des femmes contre l’Otan ». Il faut prendre toutes les initiatives possibles. – Tant qu’il n’y aura pas de justice, il n’y aura pas de paix. – Lula est un des rares chefs d’Etat importants à se prononcer en faveur d’une solution diplomatique. Ne faudrait-il pas s’adresser à lui pour qu’il porte cette position avec nous ? – La paix sera imposée par la mobilisation des peuples. Donc l’importance de l’indépendance des organisations ouvrières et démocratiques est décisive. Aujourd’hui, il n’y a pas d’union sacrée pour la guerre, mais il faut faire attention. Il y a eu et il y a des débats dans La FI pour faire progresser la nécessité de l’indépendance, au moment des votes à l’Assemblée nationale et sur les votes au Parlement européen. |
