Les conséquences brutales à Manitou de la nouvelle convention collective de la métallurgie

Les explications de Pierre-Louis Montaudon, délégué syndical FO dans le groupe manitou, à Ancenis (44).

Assemblée générale à Manitou, le 26 janvier, lors du combat contre la réforme des retraites (DR).
Par la rédaction d'IO
Publié le 5 novembre 2023
Temps de lecture : 3 minutes

Une nouvelle convention collective de la métallurgie entre en vigueur au 1 er  janvier prochain. Remplaçant les dizaines de conventions territoriales existantes, elle introduit une nouvelle classification, dont le patronat se saisit pour dénoncer des accords locaux, comme nous l’explique Pierre-Louis Montaudon, délégué syndical FO dans le groupe Manitou, dont le siège social est à Ancenis, en Loire-Atlantique, et où les négociations viennent de s’achever.

Peux-tu nous décrire comment ton syndicat a abordé ces négociations ?

Pierre-Louis Montaudon : Tout d’abord, il faut savoir que la direction a saisi l’occasion pour dénoncer la quasi-totalité des accords Manitou qui améliorent les dispositions de la convention collective actuelle, notamment sur les grilles de salaires très supérieures aux minima territoriaux, produits de 50 ans de combat syndical. Le ton était donné.

Et effectivement, les treize réunions de négociations, sur le thème des classifications, ont confirmé par la suite que la direction y a vu l’opportunité d’abaisser le coût du travail de manière très importante. 

Notre priorité absolue a été de renégocier toutes les grilles de salaires en repositionnant les minima Manitou actuels dans la nouvelle grille des classifications car, nouvelle convention ou pas, la valeur et la nature de nos emplois ne changent pas.

Quelles ont été vos propositions ?

Nous n’avons pas fait de surenchère. Pour les non-cadres, nous avons transposé les minima actuels dans la nouvelle grille avec quelques ajustements dans la mesure où il a moins de positions, ajustements sans réel impact financier. Seules nos demandes de créations de minima pour les non-cadres au forfait jours et les cadres représentent un coût. Bien qu’il soit fort limité, 0,6 % de la masse salariale, la direction a refusé notre proposition.

Que propose-t-elle exactement ?

Une baisse brutale des minima mensuels. Pour les intérimaires, 32 € de baisse ; pour les ouvriers, de 70 € à 90 € ; pour les employés et techniciens selon le classement, 89 €, 178 €, 205 € et même 223 €. Les agents de maîtrise ne sont pas mieux lotis. La direction veut infliger une baisse des minima de 112 € à 422 €. Pour les cadres « position 2 », la très grande majorité des cadres, afin de compenser la suppression de l’avancement automatique tous les trois ans, nous avons proposé que soit généralisée une augmentation individuelle tous les 4,5 ans. Refus de la direction et suppression de cette disposition pour tous les non-cadres. 

A l’avenir, les salariés de Manitou seront donc confrontés à l’arbitraire des augmentations individuelles, sans aucune garantie pour les protéger contre d’éventuelles discriminations.

C’est déjà un recul considérable. On pourrait s’attendre à ce que la direction s’arrête là ?

Eh, bien non ! Elle veut imposer des régressions dans notre dispositif de promotion professionnelle. Le remplacement de la classification basée sur le diplôme et l’expérience par la classification au poste à la main de l’employeur a des répercussions sur ce plan là aussi. Elles seront plus rares. A l’avenir, la promotion impliquera un nouveau « besoin opérationnel », un nouvel emploi en quelque sorte et nécessitera de justifier sa création.

De plus, les évolutions au sein d’un même emploi seront beaucoup plus rares qu’aujourd’hui car de nombreux emplois n’auront plus qu’un seul niveau alors qu’aujourd’hui ces emplois possèdent des fourchettes de coefficients qui autorisent plusieurs promotions.

Que compte faire ton syndicat ?

Face à cette situation, FO ne restera pas l’arme au pied pour défendre les intérêts collectifs des salariés. Malgré la nouvelle convention collective de la métallurgie, nous pouvons, par accord d’entreprise, maintenir tous les droits actuels des salariés.

Juridiquement rien ne s’y oppose. Pour l’heure, nous avons signé l’accord relatif à la conservation des avantages sociaux afin de préserver le mode de calcul de la prime d’ancienneté sur le salaire réel, la garantie de maintien de salaire en cas de maladie dès 3 mois d’ancienneté au lieu d’un an, la prise en charge par l’employeur des cotisations de certaines cotisations à l’Agirc-Arrco, le CET (compte épargne temps) individuel et le CET Fin de Carrière.

Nous avons aussi signé l’accord sur la polyvalence et la mobilité temporaire sur un poste de qualification supérieure afin de préserver ces deux dispositions spécifiques aux salariés de production.

Evidemment, nous ne serons pas signataires, en l’état, de l’accord sur les rémunérations pour les raisons évoquées précédemment. Maintenant, nous devons agir pour récupérer le reste de notre statut collectif, voire l’améliorer. C’est le rôle du syndicat.