« La France étant encore une puissance coloniale, il nous paraît normal d’être particulièrement attentif à ses exactions »

Miguel Martinez, secrétaire du Comité international contre la répression, nous présente le Cicr et revient sur la campagne lancée pour la libération des prisonniers politiques kanaks, Christian Tein et ses camarades, actuellement détenus dans des prisons de l'Hexagone.

(DR)
Par la rédaction d'IO
Publié le 17 octobre 2024
Temps de lecture : 2 minutes

Qu’est-ce que le Cicr ?

Le Comité international contre la répression (Cicr) s’est constitué à Paris en 1976. Son président fondateur, maître Yves Dechevelles, le présentait ainsi : « Le Cicr se fait un devoir d’aider ceux qui sont menacés ou victimes de la répression parce qu’ils résistent à la remise en cause des droits acquis (…) Le Cicr ignore la raison d’État et exerce sa complète liberté de critique à l’égard des institutions internationales qui ne sont souvent que le paravent derrière lequel agissent les grandes puissances pour mieux assurer leur domination. »

Depuis sa fondation, le Cicr a mené de nombreuses campagnes à travers le monde. Pour ne prendre qu’un exemple, le Cicr engage en 1993 une longue campagne pour la libération du poète Faraj Bayrakdar emprisonné en Syrie. Après des années d’une bagarre acharnée au cours de laquelle le Cicr parvient à organiser une délégation reçue par la Commission pour les Droits de l’Homme de l’ONU, Faraj est enfin libéré en 2000. C’est un exemple parmi des dizaines d’autres dans l’histoire de notre comité, mais je crois que cette victoire illustre bien ce qu’est le Cicr, une preuve de sa ténacité.

Pourquoi le Cicr a-t-il décidé de mener une campagne pour la libération de Christian Tein et de ses camarades emprisonnés ?

Le Cicr étant basé en France, et la France étant encore une puissance coloniale, il nous paraît normal d’être particulièrement attentif à ses exactions et autres méfaits en Guadeloupe, en Martinique… De la même manière, il est parfaitement naturel que nous ayons participé aux actions organisées en France pour les cessez-le-feu à Gaza, pour la défense de militants LFI, de syndicalistes, mis en cause et tout récemment de militants de la Libre Pensée de l’Hérault.

Lorsque nous avons appris que Christian Tein et ses compagnons avaient été déportés en France et dispatchés aux quatre coins de l’hexagone, il était clair pour nous qu’il fallait agir.

Même en adoptant un regard purement institutionnel sur la question – ce qui n’est pas notre tasse de thé -, on est obligé de constater que la détention de ces militants répond à la caractérisation de prisonniers politiques des textes du Parlement européen : elle est imposée pour des raisons purement politiques, les conditions sont disproportionnées au regard des faits reprochés, elle est discriminatoire et est clairement liée aux motivations politiques des autorités.

Le transfert en France de ces militants à des milliers de kilomètres de chez eux, constitue déjà en soi une condamnation, sans procès ni jugement. En fait il s’agit pour l’appareil d’État de couper tous les fils qui relient le peuple kanak aux représentants que celui-ci s’est librement choisi. L’État français renoue ainsi avec de funestes traditions, les mêmes qui l’ont conduit à déporter Toussaint-Louverture à Fort de Joux en 1802 ou encore Messali Hadj dans diverses villes de France entre 1952 et 1962, et bien d’autres. Ce sont les mêmes ressources d’un pouvoir colonial dépravé et aux abois, on ne pouvait pas rester les bras croisés.

Retrouvez ICI l’appel pour la libération des prisonniers politiques kanaks.