« Compromis » versus rupture ?

Un budget de guerre au service du capital financier résumé en un chiffre : 7 milliards en plus pour la guerre, 7 milliards en moins pour la santé.

(photos DR)
Par Rosalie Albani
Publié le 5 novembre 2025
Temps de lecture : 4 minutes

Mardi 4 novembre, aux Assises de l’économie de la mer organisées à La Rochelle, Emmanuel Macron a déclaré : « On ne rend pas un pays plus heureux quand on empêche ses champions d’aller conquérir de nouveaux marchés. »

Ainsi en plein débat à l’Assemblée nationale sur un budget austéritaire comme jamais avec des dizaines de milliards d’euros de coupes dans la santé, l’école ou la Sécurité sociale, Macron choisit d’adresser un message à ses troupes, au PS, à la droite et au RN : pas touche à mes « champions », les ultra-riches, ceux dont les fortunes dépassent aujourd’hui les 1 200 milliards d’euros, dix fois plus en vingt ans.

Précisément, ceux que combat le candidat de DSA Zohran Mamdani, favori dans les sondages à quelques heures des résultats de l’élection municipale à New York, porteur d’un programme de rupture contre lequel se sont ligués les ultra-riches. Pas pour rien que Donald Trump et Elon Musk aient appelé à voter pour son adversaire du Parti démocrate Cuomo…

Parmi ses « champions », Macron pense bien sûr à son ami Rodolphe Saadé, patron de la CMA-CGM, troisième plus grosse entreprise mondiale de transport maritime et qui a réalisé 14 milliards de bénéfices nets en 2024.

CMA-CGM qui bénéficie actuellement de la niche tonnage sur le transport maritime : 6 milliards d’euros en moins par an pour les finances publiques. Grâce à cet avantage fiscal, la CMA-CGM reverse seulement 180 millions d’euros alors qu’elle devrait reverser plusieurs milliards si elle était assujettie à l’impôt sur les sociétés.

Voilà une incarnation à l’instant T de ce qu’entend protéger et favoriser le budget Macron-Lecornu-Faure.

Un véritable budget de guerre au service du capital financier résumé en un chiffre : 7 milliards en plus pour la guerre, 7 milliards en moins pour la santé.

Le PS a obtenu une chose : le sursis du gouvernement Macron-Lecornu

Dans une commission au ministère des Armées, Hubert Bonneau, le directeur général de la Gendarmerie nationale, évoque la nécessité de « se préparer à une contestation » de l’opinion publique en cas d’engagement militaire à l’Est. « Ça ne se passera pas sans agitation sur le territoire national. Nous pourrons avoir des sabotages, des manifestations. Je ne suis pas sûr que tous nos concitoyens soient favorables à ce type d’engagement. C’est à cette hypothèse que nous devons nous préparer ».

Selon le baromètre publié par Le Figaro Magazine le 30 octobre dernier, Macron a vu sa cote de confiance tomber à 11 %. Le pire score enregistré par un président sous la Ve République !

Début octobre, 70 % des Français demandaient sa démission dans un sondage Odoxa. Voilà la réalité : rejetés de toutes parts par la population, Macron, Lecornu et leurs soutiens veulent faire passer en force des milliards supplémentaires pour préparer la guerre.

C’est cette politique que le Parti socialiste a permis de maintenir en vie en ne votant pas la censure il y a un mois. Car s’il y a bien quelque chose que le Parti socialiste a gagné, c’est le sursis de ce gouvernement qui aurait pu être renversé avec sa politique.

Depuis deux semaines, Olivier Faure fait le tour quotidien des plateaux télé pour dire pour dire « retenez-moi ou je fais un malheur » (dixit Manuel Bompard sur Franceinfo le 4 novembre). « S’il n’y a pas la suspension complète de la réforme des retraites, on censurera. » Mais la suspension n’y est pas et ils n’ont pas censuré. « S’il n’y a pas la taxe Zucman, on va censurer. » Pas de taxe Zucman, pas de censure. « S’il n’y a pas la taxe Zucman light, on va censurer. S’il n’y a pas un geste pour le pouvoir d’achat des Français, on va censurer. » Rien. Au point que ce qui reste de sympathisants et de militants du PS est à l’heure actuelle plongé dans un trouble pour le moins profond.

Olivier Faure a assuré que le PS n’est pas « à la recherche d’un budget qui soit socialiste ». Sans blague ! En changeant d’alliance, en poursuivant en coulisse ses discussions « secrètes » avec Attal et ses déjeuners à Matignon avec Lecornu, le Parti socialiste a tourné le dos au programme pour lequel il a été élu et qui constitue son mandat : le programme de rupture du Nouveau Front populaire.

Manifestation nationale contre le génocide à Gaza le 29 novembre

Ce gouvernement n’a rien d’autre à promettre au plus grand nombre qu’une politique de malheur et de misère. Dernières « horreurs » dévoilées et dénoncées sans relâche par les courageux députés insoumis : l’interdiction des découverts bancaires, la suppression de la prime de Noël pour les personnes sans enfants bénéficiaires du RSA…

« La générosité qu’on a connue pendant des décennies est peut-être arrivée à son terme », assume le ministre du Travail et des Solidarités J.-P. Farandou sur France Inter le 4 novembre, celui qui vient d’ouvrir la conférence sociale, le conclave II, avec les organisations syndicales. Alors que ce pays frôle les dix millions de pauvres, Farandou ose parler de « générosité » ! Quelle indécence !

« Le PS cherche à tout prix un compromis avec la macronie pour éviter un retour aux urnes » dénonce Éric Coquerel sur Public Sénat. « Le PS a réussi l’exploit de voter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) et ses horreurs dont la diminution des indemnités des maladies longue durée, limitation des arrêts de travail etc. Je ne sais plus où habitent les socialistes. »

Rappelons que la veille, le 30 octobre, le RN avait réussi à faire voter sur le fil un texte réactionnaire, dénonçant les accords de 1968 avec l’Algérie, pour désigner une partie de la population de notre pays comme bouc émissaire. Le RN qui s’est totalement démasqué dans cette séquence budgétaire en votant avec le bloc central d’Attal tous les amendements en faveur des plus riches.

Ces tambouilles politiciennes, ce jeu de dupes entre Lecornu et Faure : des millions n’en peuvent plus et n’en veulent plus. La réalité, c’est que pour la majorité, il n’y a aucun accommodement possible avec ce gouvernement, sa politique et son budget de misère.

En France, des dizaines d’organisations, dont la France insoumise, la CGT, la FSU, Solidaires et plusieurs associations de défense des Palestiniens en France, sont signataires d’un appel à une manifestation nationale le 29 novembre également sur ces exigences. Nous en sommes à fond !

Pour en finir au plus vite avec Macron, son budget, sa politique de misère : se regrouper, s’unir, s’organiser.