Le 1er mai, et après…

Des millions cherchent à en finir avec le diktat de Macron. Le plus réaliste serait de prendre en considération ce que Macron lui-même avait dit et fait dire par son entourage : seul le blocage du pays le ferait reculer.

A Bordeaux, le 1er mai (photo AFP)
Par la rédaction d'IO
Publié le 2 mai 2023
Temps de lecture : 3 minutes

La manifestation du 1er Mai a été un succès considérable.

Tous ceux qui, sournoisement ou ouvertement, espéraient qu’une nième manifestation, après d’autres n’ayant pas obtenu satisfaction, finirait par provoquer recul, abattement, fin de mobilisation, en sont pour leurs frais.

Le refus du diktat d’un homme, appuyé sur des institutions antidémocratiques contre le peuple, non seulement ne passe pas mais devient de plus en plus politique contre l’homme, le système et les institutions.

Le refus de se faire exploiter, au seul bénéfice des plus riches et des plus puissants, ne fait qu’augmenter.

Et si l’on considère les casserolades, les « empêchements » du président et de ses ministres (la prestation ridicule du président au Stade de France par exemple), les blocages, il est certain que la recherche des moyens pour obtenir le retrait devient une donnée incontournable.

Cité par le Huffington Post, Laurent Berger a déclaré : « On ne peut pas faire croire aux travailleurs qu’avec une manifestation toutes les semaines, on fera retirer la réforme. »

De son côté, dans Le Journal du dimanche, Frédéric Souillot déclare : « Réécoutez les déclarations de Jacques Chirac et de Dominique de Villepin avant le 1er mai 2006, en plein conflit sur le contrat première embauche, ou celles d’Emmanuel Macron en juin 2020 sur la création d’un système universel de retraite : vous verrez bien que des lois ont beau avoir été votées, elles n’ont jamais été appliquées. C’est quand les musiciens rangent leurs instruments que le bal est vraiment terminé. Nous continuerons à nous mobiliser pour faire reculer le gouvernement. »

Ils ont raison. Chacun à leur façon tiennent compte de la réalité et ils disent vrai !

On éprouve donc une certaine gêne à constater que les préoccupations et analyses fondées ne se retrouvent pas vraiment dans le dernier communiqué de l’intersyndicale qui réaffirme pourtant, au bénéfice de tous, l’exigence de retrait. Elles n’en sont pas le cœur.

On y trouve par contre un salut appuyé aux dirigeants de la CES et de la CSI, présents à la manifestation à Paris. Surprenant lorsqu’on sait à quel point les dirigeants de ces instances finissent par considérer comme intouchables les décisions lorsqu’au bout du compte elles deviennent des lois, des règlements des Etats ou de l’Europe.

On y trouve aussi, encore, la référence au Rip, dont tout le monde sait maintenant que validé ou pas par le Conseil constitutionnel, il est une « machinerie » inventée soit pour ne jamais voir le jour, soit d’une complexité telle que, alors que la puissance de la mobilisation ne reflue pas, il prendra au minimum 15 mois après avis de l’Assemblée et du Sénat. Tout en sachant parfaitement le peu d’engouement des militants pour cette opération.

Il n’étonnera personne que Fabien Roussel ou Bernard Cazeneuve en fassent l’alpha et l’oméga de la bataille. Protéger les institutions vaut bien une supercherie.

Et, comme un élément particulièrement important, au point que la prochaine 14e journée du 6 juin lui soit quasiment concomitante, la proposition de se saisir de l’initiative de proposition de loi du groupe Liot1Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires, groupe parlementaire de députés centristes. à l’Assemblée nationale. Ce qui n’est une surprise pour personne puisque ceci avait déjà été mis sur la table par Sophie Binet, y compris la date, avant même la manifestation du 1er Mai.

Que l’on puisse penser que cette initiative Liot soit de nature à approfondir la crise ouverte des institutions et accentuer la crise démocratique, c’est parfaitement le droit de partis ou militants politiques.

Encore faut-il, dans ce cas, saluer l’action et la détermination du groupe LFI à l’Assemblée nationale qui ont contribué à mettre les choses à nu.

Encore faut-il préciser que, malgré cette crise profonde, Macron se refuse à céder. On peut donc estimer que concentrer le dispositif sur cette échéance Liot engendre des interrogations. D’autant que cette proposition Liot fait fi de nombreux aspects très réactionnaires de la contre-réforme de Macron et que, quand bien même elle serait acceptée par l’Assemblée nationale, il faudrait qu’elle s’en retourne au Sénat.Le moins que l’on puisse dire est que le résultat pour le retrait est loin d’être garanti. Mais n’importe quel militant politique ne rechignera pas à creuser encore plus la crise de régime, à affaiblir Macron et ses soutiens, pour s’en débarrasser.

En fin de compte, pour répondre à cette recherche de millions qui ont la volonté d’obtenir le retrait, le plus réaliste serait de prendre en considération ce que Macron lui-même avait dit et fait dire par son entourage : seul le blocage du pays le ferait reculer.

Le communiqué de l’intersyndicale propose de « multiplier les initiatives avec notamment une nouvelle journée d’action commune de grèves et de manifestations le 6 juin prochain qui permettrait à l’ensemble des salariés de se faire entendre des parlementaires ». Pourquoi pas ? Si cela peut contribuer à organiser une action efficace.

Et pourquoi pas aussi utiliser partout, selon les conditions concrètes, la période qui vient pour organiser calmement, sans violences, méthodiquement, ce qui, incluant nombre d’initiatives et de propositions, serait la seule chose à même de faire reculer M. Macron et son gouvernement : grève et blocage du pays.