Sénégal : « Ce serait une grosse erreur de vouloir combattre nos frères du Niger »
Interview d'un membre de la direction de la Ligue des travailleurs et des étudiants sénégalais (LTES), membre de l'EIT
- International, Niger, Sénégal

Le premier parti d’opposition a été dissous, son leader, Ousmane Sonko, est derrière les barreaux et tous les réseaux mobiles sont coupés depuis plus d’une semaine. Quelle est la situation aujourd’hui et pourquoi cet acharnement de Macky Sall contre l’opposition ?
La politique au Sénégal a connu de grands changements grâce à une nouvelle communication des dirigeants du parti Pastef et de ses alliés dans les différents médias et les réseaux dénonçant tous les maux qui gangrènent la société sénégalaise, ses institutions, le système capitaliste – impérialisme qui est un échec total –, la gestion du développement de notre pays. Le parti a demandé un changement total du système actuel qui seul pourrait résoudre nos multiples problèmes. Un appel que les jeunes cadres et les jeunes notamment ont compris.
Le parti Pastef a porté un nouveau projet de société que la plus grande partie de la jeune population s’est approprié, d’où la popularité grandissante du président Ousmane Sonko dans tout le pays.
Un parti qui sera très vite structuré et dirigé par de hauts cadres de l’administration et du privé. Une mauvaise surprise pour Macky Sall et sa coalition Benno, Bokk Yakaar (BBY), qui voient venir le désastre et la fin du régime à court terme. Il fallait alors vaille que vaille trouver un plan pour contrer Ousmane Sonko et son parti. A partir de ce moment, le leader du Pastef commença à connaître les brimades et les vexations de la part des institutions de l’Etat et des leaders de BBY à travers Macky Sall. Cela a radicalisé l’opposition, et en particulier les positions d’Ousmane Sonko, pour faire face ou mourir. Le scénario mis en place a permis d’accumuler différentes accusations contre le leader Ousmane Sonko qui se présente sur le terrain politique comme chef de l’opposition.
Grâce à la détermination de la population et des avocats sénégalais patriotes les complots furent déjoués. Mais pour la majorité présidentielle il faut trouver vite des solutions, d’autant que la pression pour la non-représentation au troisième mandat était forte. Résultat : l’emprisonnement des différents leaders du Pastef et de son président, Ousmane Sonko.
Ce dernier refusa de manger les repas de la prison et exigea les repas préparés par sa famille. Devant le refus de l’administration, le leader Ousmane, ne mangeant pas, finit à l’hôpital principal de Dakar. Son parti, le Pastef, fut dissous entre-temps et sa radiation sur la liste nationale fut faite. Un acharnement qui ne plaît pas à ses militants et à la majorité des membres de l’opposition qui exigeaient des élections inclusives pour tous, avec Ousmane Sonko.
Macky Sall soutient les menaces d’intervention militaire de la CEDEAO, de l’Union africaine, des USA, de la France… et dit qu’il enverrait les militaires sénégalais se battre contre le Niger. Qu’en pensent le peuple et les travailleurs sénégalais ?
Au lieu de vouloir rétablir la démocratie au Niger, Macky Sall devrait d’abord nettoyer devant sa porte. Actuellement, le Sénégal détient des centaines de détenus innocents et des membres de Pastef. Les libertés d’expression et d’opinion sont bâillonnées, d’autant que les arrestations continuent, dont on ignore les causes réelles.
La population reste déterminée et cela se traduira dans les urnes si les élections de 2024 se maintiennent. Et du fait du retrait contraint de Macky Sall pour briguer un troisième mandat, on semble chercher dans l’opposition et dans BBY des candidats susceptibles de défendre le régime et le système capitaliste. Il est clair que le président de la République actuel a renoncé à son troisième mandat du fait de la forte pression de l’opposition sénégalaise et de sa diaspora, malgré le désir de la France et ses alliés du capitalisme de le revoir à la tête de l’Etat sénégalais.
Macky Sall est un ami de la France et de l’impérialisme européen dont il défend les intérêts. Son obstination pour rétablir la démocratie au Niger en envoyant les militaires sénégalais combattre la junte est le choix de la France et de ses alliés qui voient leurs intérêts menacés. La population sénégalaise est totalement contre cette intention de Macky Sall. Ce serait une grosse erreur de vouloir combattre nos frères du Niger.
