Marseille : les parents d’élèves mobilisés
L’image d’une élue du Printemps marseillais sans voix devant les mamans en colère, filmée par France 3, tourne en boucle sur les réseaux. Depuis plusieurs jours, parents et enseignants, se mobilisent dans plusieurs écoles publiques, confrontés à l’état désastreux de leurs locaux.
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Ils « veulent de la sérénité pour leurs enfants », comme le rapportait France 3 à propos de l’état de délabrement de l’école maternelle Notre-Dame-Limite-Château-Burzio que les parents bloquaient le lundi 18 novembre dans le 15e arrondissement de Marseille. Ils disent : « On ne se laissera pas faire. »
Ce même jour, les parents, les élèves, les enseignants de l’école communale Révolution, dans le 3e, confrontés à l’effondrement d’un mur, la dégradation des planchers, et un état général qui ne permet pas d’étudier correctement, bloquaient également leur école. Les militants LFI étaient là, avec le député LFI-NFP Sébastien Delogu.
Le lundi 25 novembre, ce sont les élèves et les parents de l’école Saint-André-la-Castellane qui bloquent leur établissement. L’entreprise qui avait été choisie par la Société publique des écoles de Marseille, codirigée par l’État et la mairie, a arrêté les travaux pour des raisons financières. Fissures dans la cour, infiltrations d’eau, toitures démontées par les intempéries, s’ajoutent aux effectifs surchargés dans les classes.
Les parents manifestent : « On veut une école ». Surveillées par la police nationale, les mamans rejettent les représentants de la mairie qui arrivent : « Ça fait plusieurs semaines qu’on ne les a pas vus ». Elles ont scandé : « elle est à l’abandon l’école », « on a peur qu’elle s’écroule », « la maternelle est désossée ».
Sébastien Delogu, toujours présent aux côtés des parents, a dénoncé l’immobilisme et l’inaction de la mairie. Il ne s’est rien passé, dit-il, depuis mars lorsqu’il était déjà intervenu. En juin 2023, Sébastien Delogu avait publiquement interpellé Macron lors de sa venue à Marseille, lui et son ministre de l’époque, Pap Ndiaye, sur l’état de cette école de La Castellane, devant un Payan (le maire de Marseille) muet.
Mercredi 20 novembre, ce fut au tour des parents et enseignants de l’école Parc-Bellevue, à Félix Pyat (3e), de manifester avec leurs syndicats unis, et toujours le soutien de la LFI et du député LFI-NFP. Ils ont débordé le dispositif de sécurité privée, lors de l’inauguration officielle de la cité scolaire internationale, pour interpeller les élus, Ganozzi, adjoint de Payan, pour la ville, Vassal (LR), pour le département et Muselier (Macron) pour la région, les trois collectivités qui ont, avec l’État, dépensé 100 millions d’euros publics pour cette cité de luxe réservé pour l’essentiel aux privilégiés.
Les parents de Parc-Bellevue cherchent à obtenir pour leurs enfants le droit de pouvoir étudier dans ces locaux magnifiques et quasi inoccupés à proximité de leur école bouleversée de fond en comble par des travaux prévus pour quatre ans.
Devant la mobilisation, élus de la région, de la métropole et de la mairie reprennent leur demande qui dépend en dernière analyse du rectorat. Mais, comme l’a communiqué la région il faut que « les enfants de l’école soient temporairement accueillis à la cité scolaire internationale Jacques-Chirac le temps des travaux engagés en fin d’année prochaine ». Ensuite, la discrimination reprendra ses droits : les riches avec les riches, les pauvres avec les pauvres. Le rectorat avait refusé la demande syndicale que cette cité scolaire entre dans la réglementation commune des affectations ouvertes à tous.
Muselier a prétendu que c’était la cité de « l’égalité des chances », Ganozzi qu’il avait agi pour qu’il y ait de la « mixité sociale ». Regardons les chiffres : il y a 7 702 enfants de 5 à 14 ans dans le seul 3e arrondissement, l’un des plus pauvres du pays (Insee, 2019). Le nombre d’entre eux à être autorisés, sur « dossier » dès le CP à accéder à la cité scolaire internationale est de… 165. Sans commentaire, sinon que son coût de 100 millions dépensés est à comparer avec le récent prêt de 200 millions d’endettement de la ville dont se félicite Ganozzi pour la promesse de la rénovation future de 154 écoles…
Face aux multiples blocages, l’adjoint au maire du Printemps marseillais (PS, PCF, société civile), chargé du « plan école », Pierre-Marie Ganozzi (ancien responsable départemental de la FSU), essaye en vain de calmer la colère des parents. Il a beau minimiser les risques, ça ne passe pas. Comment ne pas penser aux mêmes propos lénifiants de la municipalité précédente avant l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne dont le procès se déroule actuellement ?
Derrière la propagande de la mairie et de l’État vantant les mérites du plan « Marseille en grand », chaque jour révèle la réalité du caractère indigne d’un grand nombre d’écoles.
Dans le journal La Provence du 25 novembre, Ganozzi répond en assurant que 18 écoles seront inaugurées avant juin 2025. Sur les 188 écoles du plan annoncé et il y a 470 écoles publiques à Marseille. Les travaux devraient se dérouler jusqu’en… 2033, aggravant dans le temps l’inégalité entre les élèves suivant leurs affectations.
Sur les dix ans qui viennent, quelle école n’aura pas besoin de travaux ? « C’est un vrai défi », dit-il. Il est bien à plaindre… Mais quel est le « défi » pour les élèves et les différents personnels confrontés à des conditions d’études indignes comme, par exemple, à l’école Ahmade-Littim qui certes ne s’appelle plus « Bugeaud », mais est toujours constitué de vieux préfabriqués ? On change le nom mais la misère reste. Et la colère s’étend.
Quand le journaliste de La Provence rappelle à l’adjoint de Payan l’austérité budgétaire du gouvernement Barnier, Ganozzi a cette réponse inouïe : « Je ne vois pas pourquoi l’État se dédierait, et ce n’est pas le sens de mes échanges avec le préfet qui, à chaque fois, a été très rassurant. »
Manifestement le Printemps marseillais est plus facilement rassuré par le préfet de Macron, que les parents d’élèves par le Printemps marseillais.
Et le journal d’ajouter : « Face aux restrictions budgétaires qu’entend leur imposer l’État, Martine Vassal, la présidente (DVD) du département et de la métropole, et Benoît Payan (PS) ont décidé de faire front commun (…) pour aller avec la présidente, comme on l’a déjà fait, à la rencontre de tous les acteurs nationaux pour défendre Marseille en grand. »
Quels « acteurs nationaux » ? Ce Premier ministre du même parti que Martine Vassal ! Pour défendre un « Marseille en Grand » de poudre aux yeux macronistes, dont le rapport de la Cour des comptes elle-même a souligné le caractère « indigent » ? Ce gouvernement qui s’apprête à utiliser le 49.3 pour un budget intolérable au peuple ? Ce gouvernement dont la vie ne tient plus qu’à un fil.
Dans les écoles, mais aussi chez les cheminots, dans toute la fonction publique, comme dans les entreprises touchées par les plans « sociaux », la question de la grève, non pas pour témoigner mais pour gagner, se pose.
Les intérêts des personnels sont inséparables de ceux des parents et de leurs enfants.
Comment peut-on prétendre défendre les habitants des communes, sauver une « république de la proximité » sans remettre en cause ce gouvernement illégitime et minoritaire ?
La politique de rupture nécessaire au plan national ne l’est pas moins au plan local, pour rompre avec les politiques qui visent à transformer les élus en gestionnaires de l’austérité. En défendant les revendications des parents et des enseignants, pied à pied, sur le plan local, la France Insoumise contribue à une mobilisation d’ensemble dont le premier objectif vital doit être dans nos quartiers comme à l’assemblée nationale, de faire tomber ce gouvernement.