Gaza : les gouvernements complices laissent les mains libres à Netanyahou

Malgré un immense refus des travailleurs et des peuples face à l’horreur, Netanyahou poursuit son éradication avec la complicité de l’UE, de Trump… et de tous ceux qui se refusent à mobiliser pour le stopper.

Des milliers d’enfants sont immédiatement menacés de mourir de faim, à Gaza, le 19 mai. (AFP)
Par Pierre Valdemienne
Publié le 21 mai 2025
Temps de lecture : 4 minutes

Samedi dernier (17 mai), et alors que le blocus sur la nourriture, l’eau et les médicaments se poursuit depuis plus de deux mois dans la bande de Gaza, l’armée israélienne, sur ordre de Netanyahou, a annoncé le début de l’opération « Chariots de Gédéon ». Le Premier ministre israélien a annoncé ce lundi vouloir « prendre le contrôle de tout le territoire » de la bande de Gaza. A l’intérieur des cinq camions humanitaires que le gouvernement israélien a daigné faire rentrer dans la bande de Gaza ce lundi toujours, deux étaient chargés de linceuls.

L’armée israélienne a reconnu elle-même que plus de 80 % des personnes tuées à Gaza depuis le 18 mars étaient des civils non impliqués dans les combats. « Deux millions de personnes meurent de faim » dans la bande de Gaza, a averti lundi le chef de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, ajoutant que 160 000 tonnes de nourriture « sont bloquées à la frontière à quelques minutes ». Face à cette situation insoutenable qui empire de jour en jour, la France, le Royaume-Uni et le Canada ont ensemble déclaré : « Nous ne resterons pas les bras croisés ».

Des livraisons d’armes records

Ah bon ? Et que font-ils exactement ? Ont-ils décidé immédiatement l’embargo sur les livraisons d’armes ? Le Parti travailliste britannique du Premier ministre, Keir Starmer, a approuvé la vente au gouvernement israélien de plus d’armes en trois mois que les trois années précédentes. En France, un rapport du ministère des Armées de 2024 informe que la France a vendu pour 30 millions d’euros de matériel militaire à destination du gouvernement israélien, ce qui représente le chiffre le plus élevé depuis 2016.

Ont-ils suspendu immédiatement les accords commerciaux avec le gouvernement israélien ?

Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, dans la matinale de France Inter, ce mardi, a déclaré : « Les Pays-Bas ont proposé le réexamen de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, et en particulier (celui) de son article 2 qui dit que chacune des deux parties, l’Europe et Israël, doit respecter les droits de l’homme. Nous avons soutenu cette initiative et j’appelle la Commission européenne à faire cet examen, à instruire cette demande et à montrer si oui ou non Israël respecte cet article (et) ses obligations vis-à-vis des droits de l’homme ».

La Cour pénale internationale a émis un mandat d’arrêt contre Netanyahou – et Yoav Gallant – pour crimes de guerre, de famine comme méthode de guerre et pour crime contre l’humanité ; la Cour internationale de justice, plus haute juridiction des Nations unies, a déclaré que l’occupation par Netanyahou de la Cisjordanie, de Gaza et de Jérusalem-Est viole le droit international : et le ministre des Affaires étrangères en France demande à la Commission européenne de vérifier si les droits de l’homme sont respectés par Netanyahou ? Mais de qui se moque-t-on ?

Une hypocrisie ignoble

Et le ministre des Affaires étrangères de poursuivre : « La suite, une fois qu’il est établi qu’une violation est manifeste, c’est effectivement la possibilité de suspension éventuelle ».

La « possibilité » de « suspension éventuelle »… Est-il besoin de commenter ?

Dans ces conditions, on ne peut que donner raison à l’ancien Premier ministre, Dominique de Villepin, qui a déclaré ce mardi : « L’objectif politique de Benjamin Netanyahou, c’est la déportation de la population de Gaza. Ce qui est la marque d’une épuration ethnique, d’un nettoyage territorial. Les Européens le savent et ils sont là avec leurs sabres de bois »…

Des « sabres de bois » pour tenter de masquer de plus en plus difficilement leur soutien honteux à la politique d’anéantissement du peuple de Gaza.

A l’opposé de cette politique d’accompagnement du génocide en cours, il y a les puissantes manifestations de ce week-end, à l’occasion de la journée internationale de la Nakba1Le terme arabe « Nakba » signifie « catastrophe » ou « désastre », et désigne les expulsions forcées et les massacres dont le peuple palestinien a été victime en 1948. Le souvenir de la « Nakba » est commémorée chaque année le 15 mai..

A La Haye, aux Pays-Bas, 100 000 personnes se sont rassemblées dimanche contre la politique du gouvernement néerlandais vis-à-vis du gouvernement israélien : les manifestants portaient des vêtements rouges pour tracer symboliquement une ligne rouge, exhortant le gouvernement à prendre des mesures contre Netanyahou et contre le génocide en cours. Il s’agit de la plus importante manifestation des vingt dernières années aux Pays-Bas.

500 000 manifestants à Londres

A Londres, 500 000 personnes ont inondé les rues de la capitale britannique ce samedi : là encore, il s’agit de l’une des plus importantes des vingt-sept manifestations nationales qui ont lieu au Royaume-Uni depuis le début des bombardements et des massacres à Gaza, et qui s’est dirigée une nouvelle fois au siège du Premier ministre anglais, Keir Starmer, à Downing Street. Notre camarade Jérôme Legavre, député LFI et militant du POI, y était invité par les organisateurs de la manifestation à prendre la parole.

Sans oublier ces centaines d’Israéliens qui manifestent ces derniers jours aux frontières de Gaza pour exiger du gouvernement Netanyahou l’arrêt des bombardements, de la famine des Gazaouis et le retour des otages. Citons à ce titre des extraits du communiqué du mouvement israélien Standing Together, qui appelle à ces manifestations et qui se prononce pour « un cessez-le-feu immédiat et permanent pour mettre fin aux massacres et à la famine à Gaza », dénonce une « guerre d’anéantissement » et continue de lutter pour « la fin de l’occupation ».

Et cette résistance ne s’arrêtera pas tant que les massacres et les bombardements se poursuivront.

C’est pourquoi nous sommes depuis un an et demi engagés à fond dans les manifestations organisées en France par les associations de défense du peuple palestinien, à laquelle participent la France insoumise (LFI), l’Union juive française pour la paix (UJFP), etc.

Fractures

C’est pourquoi nous sommes inconditionnellement aux côtés des Palestiniens, et ce, en dépit des calomnies, des soutiens communautaristes de Netanyahou qui se livrent à d’odieuses qualifications d’antisémitisme, à ce point ahurissantes qu’elles commencent à fracturer leur propre camp de soutien inconditionnel.

Et ce, en dépit d’une passivité, parsemée ici ou là de quelques communiqués, des plus hauts dirigeants du mouvement ouvrier qui, contrairement à une longue tradition syndicale de soutien aux peuples exploités, contrairement à l’état d’esprit de leurs propres militants qui ont le cœur serré devant de telles horreurs (en témoigne cette motion adoptée à l’unanimité des organisations syndicales de personnels et d’étudiants au Cneser, mardi 20 mai), se refusent à engager dans l’unité des mobilisations de masse, seule aide concrète pour contrer et enrayer le soutien des Macron, Bayrou, RN et d’autres d’horizons différents… Comme pour le Vietnam ou l’Algérie, il est possible de bloquer ceux qui massacrent et ceux qui les aident.