Constitution du Comité de liaison européen contre la guerre, contre la guerre sociale

Samedi 30 septembre, des militants de seize pays d'Europe se sont réunis en visioconférence. Nous leur donnons la parole.

A Paris, le 11 février (photo Christophe Archambault / AFP)
Par la rédaction d'IO
Publié le 5 octobre 2023
Temps de lecture : 5 minutes
Introduction à la discussion de Gotthard Krupp, syndicaliste allemand, membre du comité de rédaction du journal SoPoDe

« J’ai le plaisir d’accueillir des militants et militantes pacifistes de 16 pays européens qui ont répondu à l’invitation de constituer un comité de liaison européen des forces de résistance « contre la guerre – contre la guerre sociale ».

Je voudrais rappeler nos revendications communes, autour desquelles nous nous sommes unis lors de la conférence européenne du 8 juillet :

– Pour un cessez-le-feu immédiat et des négociations !

– Non aux livraisons d’armes !

– Non aux budgets d’armement et de guerre !

– Levée des sanctions !

– Ni Otan ni Poutine « Non à la guerre – Non à la guerre sociale » !

– Non à des budgets de guerre de plusieurs centaines de milliards ! Des milliards pour les hôpitaux, les écoles, les communes…

– Pour la défense du salaire réel ! Gel général des prix !

La revendication d’un « cessez-le-feu inconditionnel immédiat » est d’une importance capitale. 500 000 morts et des soldats russes et ukrainiens grièvement blessés. Il faut mettre fin immédiatement à ce massacre barbare.

Il faut empêcher que des centaines de milliers d’autres jeunes, ouvriers et paysans ukrainiens et russes soient tués. Ce n’est pas leur guerre ! De plus en plus de soldats ukrainiens et russes désertent, s’enfuient et on peut les comprendre.

Le secrétaire général de l’Otan Stoltenberg répète : « Nous devons nous préparer à une longue guerre en Ukraine » et déclare pour les pays de l’Otan, en accord avec les Etats-Unis, qu’il faut mener la guerre jusqu’à la défaite de la Russie.

Les Etats-Unis fournissent des missiles Atacms et l’Allemagne va bientôt franchir la ligne rouge en envoyant des missiles de croisière Taurus en Ukraine.

L’armement de guerre, qui se chiffre en milliards, est financé par une politique d’austérité drastique contre les hôpitaux, les écoles, l’ensemble des services publics et l’infrastructure sociale. Et ce, alors que la paupérisation et la misère sociale s’étendent dans chaque pays d’Europe.

Avec leur politique de sanctions contre la Russie, les Etats-Unis attisent la guerre économique contre les pays européens : désindustrialisation, destruction massive d’emplois, comme nous le voyons par exemple en Allemagne dans l’industrie automobile et chimique.

Cela entraîne également des conflits et des confrontations entre les pays de l’Otan. Comme dans le cas de la décision du gouvernement polonais de limiter les livraisons d’armes à l’Ukraine dans le cadre de la « guerre des céréales ».

Aux Etats-Unis, une crise profonde et des divisions secouent la bourgeoisie américaine. Malgré les interventions de Biden et Selenskyj, à l’Onu, l’Inde, l’Afrique du Sud, le Brésil, entre autres, n’ont pas changé de position et ne participent pas à la campagne mondiale contre la Russie.

C’est le moment de la lutte défensive de la population, de la classe ouvrière et de la jeunesse, contre les gouvernements qui déchaînent la guerre et la guerre sociale.

Lors de la conférence européenne du 8 juillet, nous avons pu réaliser les premiers liens des forces de résistance contre la guerre.

Nous nous heurtons, dans la lutte contre la guerre et les livraisons d’armes, dans nos organisations, dans les partis qui se réclament du mouvement ouvrier, mais aussi et surtout dans les syndicats, à des parties dans les directions qui se soumettent aux exigences de la politique de guerre des gouvernements.

J’ai été délégué au congrès fédéral de Ver.di, deuxième syndicat d’Allemagne. Le congrès a été déterminé par la volonté de 10 000 camarades syndicalistes de rejeter la tentative du comité directeur d’unir le syndicat Ver.di comme une seule force derrière la politique de guerre du gouvernement.

Même si le comité directeur a pu s’imposer lors du vote final, un tiers des délégués se sont tout de même prononcés en faveur du cessez-le-feu, de l’arrêt des livraisons d’armes, contre la politique de sanctions et de l’armement de guerre. La lutte contre la guerre ne peut plus être étouffée au sein du syndicat. Cela donne du courage !

Des mobilisations contre la guerre, organisées le même jour dans tous les pays, pourraient permettre d’exprimer de manière plus visible la force et la détermination de la lutte et de consolider la confiance dans la puissance de la résistance à la guerre. Même si dans certains pays, les forces sont encore limitées ou commencent à peine à se rassembler.

Trois propositions soumises à la discussion

1. En Allemagne, une grande manifestation aura lieu le 25 novembre prochain – à l’occasion de l’adoption du budget de guerre par le Parlement. Sahra Wagenknecht sera l’oratrice avec d’autres, elle qui a été la première députée à élever la voix au Bundestag en septembre dernier contre la politique de guerre et de destruction sociale du gouvernement Scholz.

Pendant ce temps, les gouvernements de la plupart des pays de l’Otan en Europe soumettront des budgets au vote dans les parlements, c’est-à-dire les budgets de guerre pour 2024.

Pourrions-nous, par exemple, en profiter pour organiser dans tous les pays des actions ou des assemblées contre l’adoption des budgets de guerre ?

2. Le 24 février marquera le deuxième anniversaire du début de la guerre. Cet anniversaire ne serait-il pas l’occasion de mobiliser les forces de résistance à la guerre dans chaque pays d’Europe où nous sommes représentés, par un appel commun du Comité de liaison européen à des manifestations/rassemblements ce jour-là (ou par rapport à ce jour-là) ?

Sachant que la définition exacte de l’intervention est laissée à la décision des camarades du comité de liaison dans chacun de ces pays.

3. Une tâche particulière serait de préparer une conférence européenne (présentielle) « contre la guerre – contre la guerre sociale » à Berlin en mars 2024 – comme cela a été décidé lors de la conférence européenne du 8 juillet.

Nous devrions envisager d’inviter réciproquement, selon les possibilités, des représentants de la lutte contre la guerre d’un autre pays pour des manifestations ou des rassemblements dans un pays.

Ce sont les premières propositions. La discussion est totalement ouverte. »

Quelques extraits d’interventions entendues lors de la réunion

Seize pays étaient représentés lors de la réunion : Allemagne, Portugal, France, Danemark, Etat espagnol, Finlande, Grèce, Irlande, Italie, Autriche, Belgique, Norvège, Roumanie, Serbie, Suède et Suisse. Les militants ont souligné l’importance de se réunir ainsi, ont rendu compte de leur combat contre la guerre, et ont discuté des perspectives. Voici quelques extraits des interventions.

Axel, syndicaliste autrichien : « L’Autriche se dit neutre par rapport à la guerre. Mais elle ne l’est pas politiquement : les transports d’armes se font par l’Autriche vers l’Ukraine. Notre frontière n’est qu’à 300 km. »

José Nivoi, dockers de Gênes : « C’est un honneur d’être dans ce collectif. En Italie il y a un resserrement sur l’économie de guerre. Ils ont supprimé le revenu minimum… Il y aura une manifestation le 21 octobre contre l’extension d’une base militaire de l’Otan. »

Message d’un groupe de militants du Danemark : « Nous, au Danemark, qui appuyons l’initiative de constituer ce comité de liaison, ferons tout notre possible pour étendre la campagne commune contre la guerre et contre la guerre sociale. »

Vicent Garces, ex-député européen socialiste de l’Etat espagnol : « Je veux participer à cet échange. L’Espagne est de plus en plus entraînée par l’Union européenne et l’Otan pour aller jusqu’à se confronter à la Chine. La première conséquence c’est la guerre en Ukraine. »

Jérôme Legavre, POI, député LFI : « Je partage les propositions qui nous sont faites. Le gouvernement français annonce que 70 milliards de coupes budgétaires devraient être réalisées… Le combat contre la guerre implique le combat contre nos gouvernements. »

Tom Greely, militant pacifiste et anti-impérialiste irlandais : « Nous soutenons la proposition du Comité de liaison. Nous soutenons la dimension sociale de cette guerre. Depuis les années 1990 nous combattons pour une politique indépendante de l’Irlande. Nous dénonçons le fait que les militaires américains fassent des escales de ravitaillement en Irlande sur la base aérienne de Shannon. Nous organisons des manifestations, et nous soutenons nos deux eurodéputés opposés à la guerre. »

Pedro Soares, Bloc de Gauche, Portugal : « Nous répudions la récente visite du président de la République du Portugal en Ukraine et la remise de l’Ordre de la Liberté au président ukrainien qui nous a couverts de honte. Nous préconisons la convocation d’une initiative européenne de mobilisation populaire pour la défense de la paix dans les plus brefs délais. »