Le président du Cor viré par Macron

Macron vient de démettre de ses fonctions le président du Conseil d’orientation des retraites qui avait affirmé qu’il n’y avait pas de problème de financement des retraites pendant la bagarre contre la réforme Macron-Borne.

Pierre-Louis Bras, en 2015 (AFP)
Par Nicole Bernard
Publié le 2 novembre 2023
Temps de lecture : 3 minutes

Le 25 octobre, on apprend que le gouvernement n’a pas l’intention d’attendre des jours et des jours avant d’utiliser l’article 49.3 pour imposer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2 024 qui vient d’être rejeté en Commission des affaires sociales. Macron n’a nulle envie, semble-t-il, de revivre la situation du premier trimestre où le débat à l’assemblée avait alimenté la mobilisation des salariés et de la population contre sa réforme des retraites.

Or, ce même 25 octobre, le président du Conseil d’orientation des retraites1Le Conseil d’orientation des retraites, dont Pierre-Louis Bras est président depuis 9 ans, a été créé en 2000 pour fournir aux gouvernements les données chiffrées, les constats et les prévisions dont il a besoin pour sa politique. (Cor), Pierre-Louis Bras, informe l’AFP que Matignon lui a annoncé qu’il allait être démis de ses fonctions.

Il y a bien sur un rapport entre ces deux faits. Un gouvernement minoritaire dans le pays n’a pas d’autre méthode de gouvernement que le 49.3 à répétition. Ce qui implique, par ailleurs, que ceux qui ne pensent pas comme lui se taisent ou s’en aillent.

Dans son rapport de 2022, le Cor, qui, par ailleurs, n’a jamais manifesté d’hostilité aux contre-réformes successives en matière de retraites, avait fait savoir que, pour reprendre ses termes :« Les résultats de ce rapport ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite. »

Ce qu’il ne faut pas dire, ce qu’il faut cacher

Ou, dit autrement, selon le Cor, les prévisions ne justifient aucunement le discours selon lequel le recul de l’âge de la retraite est indispensable pour « sauver le système par répartition » parce que « c’est l’effondrement du régime des retraites par répartition »  selon Bruno Le Maire (février 2023).

Les réformes antérieures ont bien des effets à venir avec, comme conséquence, que la part dans le PIB ne va pas beaucoup bouger. Non seulement, pour le Cor, les scénarios catastrophe de Borne-Dussopt ne correspondent à aucune étude mais ils n’ont qu’un but : justifier le recul social que constitue le report de 2 ans de l’âge de départ en retraite et, au passage, diminuer la participation de l’Etat à l’équilibre des régimes spéciaux et de la retraite des fonctionnaires2

Rappelons que la retraite des fonctionnaires ne peut pas être en déficit. Ce n’est pas une caisse dont les recettes doivent équilibrer les dépenses mais une dette de l’Etat envers ses agents. Un salaire d’inactivité.
avec lesquels Macron veut en finir une bonne fois pour toutes3L’article 1 er de la loi contre les retraites est consacré à la suppression des principaux régimes spéciaux.

Tout le monde sait que les travaux du Cor s’appuient sur des études sérieuses. Est-ce à dire que la situation financière des pensions est sûre ? Evidemment non.

S’appuyant sur les travaux du Cor, les « économistes atterrés » ont démontré que le vrai problème n’est pas celui des dépenses mais bel et bien celui des recettes et que, pour enrayer un déficit de 11,2 milliards d’euros, une augmentation de la cotisation patronale de 0,8 % suffisait. Voilà ce qu’il ne faut pas dire. Voilà ce qu’il faut cacher. Voilà pourquoi Pierre-Louis Bras doit partir et être remplacé par quelqu’un de sûr ! 

Un soutien de Macron à la tête du Cor

Gilbert Cette, économiste, a été nommé président du Conseil d’orientation des retraites (Cor) par le conseil des ministres le 31 octobre, en remplacement de Pierre-Louis Bras. Lors de l’élection présidentielle française de 2017, Gilbert cette avait apporté son soutien à Emmanuel Macron. En août 2023, il déclarait à propos de la réforme des retraites : « Il y aura toujours des critiques, mais globalement, c’est une réforme très sociale ».