A qui profite cette guerre ? Quels intérêts cette escalade sert-elle ?

Le Proche et Moyen-Orient, l’Ukraine… Et demain ? Où nous mènent tous les gouvernements ? Les travailleurs, les peuples sont fondés à refuser et à résister à leur propre gouvernement.

Manifestation à New York, le 12 avril (photo Getty Images via AFP)
Par Yan Legoff
Publié le 17 avril 2024
Temps de lecture : 6 minutes

Une nouvelle fois, c’est l’embrasement sous l’égide des Etats-Unis.

Au Proche-Orient, où depuis 7 mois, le peuple palestinien, à Gaza, subit l’horreur des bombardements intensifs et de la famine ordonnés par Netanyahu. En Cisjordanie, la violence des colons, avec l’appui de l’armée israélienne, se déchaîne.

Confronté au rejet horrifié que provoque à l’échelle internationale le massacre des Palestiniens, confronté également à une colère grandissante dans son propre pays, Netanyahu joue l’escalade. Au risque de l’embrasement généralisé. Le 1er avril il fait bombarder le consulat iranien à Damas (Syrie), entraînant la riposte du régime iranien (qui a d’ailleurs prévenu les états voisins, les Etats-Unis, 72 heures avant…)

Les gouvernements américains, britanniques, français, qui soutiennent le gouvernement Netanyahu depuis le début, et qui continuent à lui apporter leur aide, appellent aujourd’hui à l’apaisement et font part de leur inquiétude face à ce qu’ils ont eux-mêmes largement contribué à alimenter.

Une situation de dislocation généralisée. C’est que la crise les mine tous. Et elle trouve sa source dans un rejet, un refus qui malgré tout, ne se dément pas.

Netanyahu lui-même est en sursis, il joue sa survie politique.

Manifestations à Tel Aviv

Les dizaines de milliers de manifestants israéliens qui ont tout dernièrement déferlé à Tel Aviv ou à Jérusalem – en pleine guerre ! – ne sont pas tous des pacifistes – très loin de là -, mais ils veulent la libération des otages, et surtout, ils veulent tous sans exception que Netanyahou s’en aille, ils le tiennent pour responsable de la situation.

Biden, lui, risque de payer très cher son soutien à Netanyahou, un soutien qu’il est contraint d’habiller de volte-face qui oscillent entre soutien inconditionnel et tentative de tempérer son indispensable allié qu’il ne maîtrise qu’à moitié.

La réélection de Biden en péril

Le rejet et l’opposition à l’armement du régime d’extrême droite israélien, l’exigence de cessez-le-feu immédiat, sont majoritaires dans la population américaine, y compris dans le mouvement syndical. Les manifestations se poursuivent. Le rejet est tel que la réélection de Biden est en péril.

Pour mesurer la crise qui sévit au Etats-Unis, il suffit de lire le New York Times, le 13 avril, quelques heures avant l’attaques de drones iraniens. Ce journal quasi officiel du Parti démocrate – celui de Biden ! – publie son éditorial sous le titre « L’aide militaire à Israël ne peut être inconditionnelle ».

S’appuyant sur les prises de position en ce sens de très nombreux parlementaires du Parti démocrate au plus haut niveau, sur l’horreur suscitée parmi les électeurs du Parti par le massacre des Gazaouis, il y écrit que « l’Amérique ne pourra pas continuer, comme elle l’a fait, à fournir à Israël les armes qu’il utilise dans sa guerre contre le Hamas ». Et de dénoncer le « double jeu cynique » de Netanyahou qui « lutte pour sa survie politique face à la colère croissante de son électorat ».

Le journal, ajoute, ponctuant son éditorial d’un tonitruant « ça ne peut plus durer », que Netanyahou a créé « une crise dans les relations américano-israéliennes alors que la sécurité d’Israël et la stabilité de toute la région sont en jeu ». Ce qui n’a pas empêché Biden, le lendemain, de réitérer son « soutien inconditionnel » à Israël, c’est-à-dire, dans la pratique, à Netanyahou.

En France, en Europe…

En France, le rejet Macron dans la population ne faiblit pas, alimenté par le refus de sa politique anti ouvrière. Un rejet qui n’est pas amoindri, bien au contraire, par le « soutien inconditionnel » et réaffirmé de Macron à Israël. Son positionnement de va-t’en guerre en Ukraine n’arrange rien pour lui. La propagande d’Etat, relayée complaisamment ici et là, peut bien se déchaîner, quel jeune veut mourir pour l’Otan et Zelinsky ?

Au Royaume-Uni, la faillite des travaillistes, piliers traditionnels du régime, donne du carburant aux dizaines de milliers qui manifestent chaque semaine dans les plus grandes villes en soutien au peuple palestinien.

En Allemagne, la répression d’Etat devient la règle pour contenir le rejet croissant à mesure que le gouvernement persiste dans son soutien aux Etats-Unis en faveur de Zelinsky et de Netanyahou

Dans les pays arabes, les manifestations mettent en cause le soutien, qui apparaît au grand jour, des gouvernements aux agissements pro-israélien.

La liesse dans les rues de Téhéran après les envois de drones donne une indication de l’état d’esprit de la population. Les drones n’ont pas fait grands dégâts.

Pour tenter de resserrer leurs troupes en soutien à Netanyahou, les Etats-Unis et l’Allemagne entendent lancer une « coalition » contre la « force du mal ».

Qui peut dire qu’elle fonctionnera ? Tout est loin d’être sous contrôle. Les Etats-Unis, qui soutiennent Netanyahou tout en lui indiquant qu’ils ne le suivront pas dans une attaque directe contre l’Iran, seront-ils entendus ?

Tous ont aussi les yeux rivés sur les réactions que cette attaque risque fort de susciter dans les masses dans le monde entier…

En France, même les lecteurs du Figaro, dans un petit sondage organisé par le journal, refusent majoritairement une riposte guerrière d’Israël. C’est dire…

Ce qui les terrorise en haut lieu

Même le va-t-en guerre Glucksmann se trouve contraint de dire « cessez le feu » pour la Palestine. Et Hubert Vedrine, ancien ministre PS des Affaires étrangères, tout homme de l’Etat bourgeois qu’il est, affirme ouvertement : « Non, c’est Israël qui est l’agresseur ».

Et puis, surtout, des masses de jeunes viennent applaudir Mélenchon en dépit des mensonges de la propagande officielle , car LFI tient le cap du refus de la guerre, du rejet de Macron et du régime. Et c’est bien cela qui terrorise en haut lieu, au point de multiplier les interdictions de rassemblements et de réunions.

Tout cela donne une idée de leur réelle difficulté, les poussant à en faire encore plus dans le mensonge, la répression et certainement bientôt l’autoritarisme. Avec le risque réel que cela ne se retourne aussi contre eux.

Quant aux dirigeants du mouvement ouvrier, qui sont eux aussi sommés de s’aligner, qui peut dire jusqu’à quand ils pourront tenir dans leur réserve ? Macron, ce lundi 15 avril, a dit sa « confiance dans les syndicats » : « Ils ont l’esprit de responsabilité et seront à nos côtés », a déclaré Macron.

Les tout dernières déclarations de Sophie Binet (CGT) et Frédéric Soulliot (FO) ne semblent pas aller dans ce sens.

Macron espère, malgré la multiplication des annonces par son gouvernement de mesures les plus régressives les unes que les autres, que rien ne viendra perturber les jeux Olympiques.

Il n’en est pas si sûr. Avec raison.

 

Communiqué du POI (14 avril)

Attaque ici, riposte là… Provocations, déclarations fracassantes, assassinats ciblés, populations terrorisées…

Qui sont-ils ceux qui entraînent vers le pire ? Et pour défendre quoi ? Leur population ? Pour défendre les valeurs humaines minimums, la liberté, la démocratie ?

Des régimes assassins antidémocratiques, des massacreurs de civils désarmés, des gouvernements qui exploitent sans vergogne, qui pillent les richesses au bénéfice d’une poignée, qui n’écoutent pas leur propre population, qui répriment et jettent en prison. Avec encore et toujours en toile de fond, le gouvernements des USA et leur volonté, bien mise à mal, de mettre la main sur le monde pour préserver les intérêts des capitalistes et des exploiteurs.

On y retrouve « tout naturellement » le gouvernement Netanyahou massacreur des Palestiniens… Ses amis fidèles, Macron et Attal, sont de la partie avec tous les partisans d’une économie de guerre qui veulent mettre à genoux des millions de travailleurs, d’hommes et de femmes au grand bénéfice des tenants du CAC 40 qui s’empiffrent à n’en plus pouvoir… C’est pour eux qu’un Macron, dégoulinant d’orgueil, posait devant l’usine de poudre pour obus qu’il vient d’inaugurer à Bergerac. Inévitablement, on retrouve les USA bien connus pour leur « défense des libertés » comme ils l’ont fait au Vietnam, en Irak ou en Libye pour s’approprier leurs richesses… De même nature que les Zelinsky, les Poutine…

Ces guerres ne sont pas celles des peuples. Ce sont celles des nantis qui, menacés par leurs propres peuples qui résistent à l’exploitation, veulent les envoyer s’entretuer pour rester en place. Ils défendent leurs intérêts de nantis, et déjà préparent la riposte, organisent l’escalade avec toujours la terreur des réactions dans leur propre pays… Utilisant l’ONU comme un self-service, ce qui confirme qu’elle ne sert qu’à ça. Condamnant fermement, comme l’Union Européenne, l’attaque de l’Iran mais refusant de condamner la destruction de l’ambassade iranienne. Oubliant sans scrupule que sous la houlette des USA, l’Iran à qui on ne pardonne pas d’avoir chassé le Shah par une révolution des masses, est soumis à un embargo meurtrier qui écrase les iraniens. L’Iran, dont Netanyahou a fait, au compte des USA, son ennemi principal, bien servi par une gouvernance antidémocratique d’une main de fer contre les libertés fondamentales. Indignation sans principes, à géométrie variable avec comme seule boussole leurs intérêts contre les peuples à commencer par le leur.

Les mêmes, sans honte, utilisent des médias aux ordres qui ont immédiatement lancé la campagne pour dire : « évidemment Israël ne peut pas rester sans riposter… ». Et tous de s’unir à nouveau dans une croisade contre l’Iran, présenté une fois de plus comme le symbole du Mal absolu. De ces croisades de sinistre mémoire à l’image de celle déclenchée à l’époque par l’impérialisme américain contre l’Irak.

Ces guerres sont celles de ceux-là mêmes qui depuis des mois tentent de légitimer les massacres de Palestiniens, et n’ont de cesse de pousser au racisme, de dresser les gens les uns contre les autres. Ceux-là mêmes qui, pour tenter de faire taire toute protestation, ne reculent devant aucun mensonge et répètent en boucle que « seuls des antisémites peuvent condamner les massacres de Palestiniens ».

Halte à la guerre ! Arrêt des massacres à Gaza ! Cessez le feu immédiat !

Les travailleurs, les peuples, sont fondés à refuser et à résister à leur propre gouvernement.