« Pour ces gens-là la guerre est une bénédiction »

Lors de la conférence du 4 octobre et au meeting du 5 à Paris, ce sont notamment des militants russes et ukrainiens qui agissent ensemble dans un réseau contre la guerre, pour la paix et la fraternité entre les peuples. Nous reproduisons des extraits de leurs interventions.

Chars de l’usine allemande Rheinmetal (2025) (photo AFP).
Par > Verbatim
Publié le 20 octobre 2025
Temps de lecture : 3 minutes

Suite à la remarque de Trump au sujet de la Palestine : « La paix par la force », Zelensky a demandé à Trump d’appliquer cette force en Ukraine. L’administration américaine met en avant la possibilité de livrer à l’Ukraine de missiles Tomahawk, missiles à longue portée qui peuvent atteindre tout le territoire russe.

Macron, bien qu’il n’ait pas les cartes en mains, s’agite néanmoins frénétiquement pour pousser à l’escalade et à la confrontation directe avec la Russie. À l’ouest de l’Europe, mais également en Ukraine comme en Russie, l’aspiration au cessez-le-feu grandit chaque jour. La veille du meeting du 5 octobre à Paris au cours duquel ont pris en commun la parole Liza Smirnova de Russie et Andrei Konovalov d’Ukraine, deux autres militants russe et ukrainien étaient intervenus lors de la conférence contre la guerre.

 

« Pour ces gens-là la guerre est une bénédiction »

Intervention d’Andrei Lebediev, militant ukrainien (extraits)

« Il ne fait aucun doute que la responsabilité principale de cette catastrophe revient à Vladimir Poutine, qui cherche à occuper mon pays. Tout le monde le sait, mais je voudrais mentionner deux autres responsables de cette catastrophe, que l’on oublie généralement. Tout d’abord, il s’agit des classes dirigeantes des pays occidentaux.

Elles considéraient l’Ukraine comme une monnaie d’échange dans leur jeu géopolitique. Elles soutenaient des gouvernements néolibéraux corrompus qui utilisaient le nationalisme et attisaient les contradictions entre les Ukrainiens à propos de la langue et de la culture. Ils ont activement soutenu le coup d’État de droite à Maïdan en 2014, qui a mis le pays au bord de la guerre civile.

Ils parlaient de liberté et de prospérité, mais utilisaient cyniquement l’Ukraine comme une colonie, comme une source de ressources et de main- d’œuvre bon marché.

Encore aujourd’hui, Donald Trump a profité de la situation dramatique de mon pays pour lui imposer un accord colonial tout à fait humiliant, en vertu duquel la majeure partie des richesses nationales, des ressources sont devenues la propriété du capital américain. Pour les gouvernements européens actuels, l’Ukraine est un instrument dans la lutte de domination géopolitique avec la Russie. La mort des citoyens ukrainiens ne les intéresse pas.

Ensuite, une partie de la responsabilité incombe à l’administration de Volodymyr Zelenski et à la classe dirigeante ukrainienne. Pour la plupart des Ukrainiens, chaque jour de guerre, ce sont de nouveaux morts et de nouvelles souffrances, mais toutes ces années, une grande partie des entreprises ont tiré d’énormes profits des commandes militaires.

Pour ces gens-là, la guerre est une bénédiction. Et ils ne veulent pas qu’elle se termine. Ils disposent d’une arme puissante : l’idéologie nationaliste. Il ne s’agit pas seulement de l’extrême droite, qui a une influence considérable dans le pays et dans l’armée. Mais aussi, par exemple, sur les objectifs de la guerre. »

« Redonner une alternative politique à la société »

Intervention d’Aleksander Voronkov, militant russe (extraits)

« Le contexte international de la guerre actuelle est également important. Aujourd’hui, la militarisation est un moyen de maintenir le pouvoir en Orient, en Occident et dans les pays du Sud. La rhétorique de la « défense de la liberté » et de la « rigueur budgétaire » en Europe et aux États-Unis fait écho à la « lutte pour la souveraineté » et à la « mobilisation » en Russie.

Les blocs militaires et les élites économiques trouvent facilement un terrain d’entente lorsque les mots « paix » et « démocratie » sont remplacés par « guerre » et « dictature ». Notre tâche consiste donc à redonner une alternative politique à la société : nous avons besoin de la paix en tant que moyen de démocratisation, et non en tant qu’« accord entre élites ».

Notre point de départ est simple mais cohérent : un cessez-le-feu immédiat comme condition préalable au lancement d’une paix démocratique et durable. Ni un « gel pour gagner du temps » ni le recours à une « défaite totale » ne résoudront le problème : le premier débouchera sur un nouveau massacre, tandis que le second risque d’entraîner une escalade nucléaire.

Une solution durable n’est possible que si les deux parties et les sociétés concernées envisagent un avenir meilleur que le présent. C’est pourquoi nous avons aujourd’hui besoin d’une paix démocratique entre les nations, et non entre les gouvernements actuels.

La justice sociale comme fondement de la paix. Le coût de la guerre doit être supporté par ceux qui l’ont organisée et qui en ont tiré profit : les hauts fonctionnaires, les forces de sécurité, les oligarques et les propagandistes.

La confiscation des superprofits et le transfert des actifs clés pour le secteur public, avec une gestion démocratique par les travailleurs et la population, sont nécessaires pour éliminer les bases matérielles de la dictature. La démocratisation politique est indissociable de la démocratisation sociale et économique.

Nous proposons également de faire du 19 janvier, une journée de commémoration des antifascistes et des victimes de la répression politique dans les pays post-soviétiques, une date commune de solidarité avec les déserteurs et les objecteurs de conscience des deux côtés du front. »