Italie : la parole à Giuliano Granato, porte-parole de Potere al Popolo

Giuliano Granato, porte-parole de Potere al Popolo, était présent quelques jours à Paris avec quelques uns de ses camarades pour apporter son soutien aux travailleurs français en grève et rencontrer les militants de différentes organisations, dont le POI.

Le 5 novembre 2022, lors de la manifestation à Rome contre la guerre (photo DR).
Par la rédaction d'IO
Publié le 15 avril 2023
Temps de lecture : 4 minutes

Quelle est la situation en Italie ? Que fait Meloni avec son gouvernement et comment Potere al Popolo résiste ?

Giuliano Granato : En termes de politique étrangère, le gouvernement Meloni continue plus ou moins dans le sillage du gouvernement Draghi. Il poursuit l’envoi des armes à l’Ukraine avec un positionnement très pro-Otan, sans jamais dire ou tenter une voie qui se rapprocherait d’une forme de diplomatie. Il est également prévu d’augmenter les dépenses militaires à 2 % du PIB, comme l’exige l’Otan.

En matière de politique économique, la ligne de Draghi est poursuivie de la même manière, à une différence près : sur cet aspect, le gouvernement Meloni laisse beaucoup plus de place aux mesures en faveur des fraudeurs fiscaux !

Et puis il y a ce qui est caractéristique de la droite, c’est-à-dire cette campagne permanente contre les immigrés. Un projet de loi qui est actuellement discuté contre eux, contre les femmes, contre les mouvements écologistes. Le gouvernement introduit des dizaines de nouveaux délits.

En ce qui concerne la guerre, Potere al popolo, avec d’autres organisations tant syndicales que catholiques, a organisé des manifestations dans toute l’Italie le 25 février, comme celle organisée à Gênes par les dockers contre l’envoi d’armes en Ukraine, mais aussi, de manière générale, contre l’utilisation de l’Italie comme plateforme de guerre, y compris en Arabie saoudite et au Yémen.

D’un point de vue social, nous pensons que ce gouvernement ainsi que celui de Draghi vont aggraver la situation des travailleurs. C’est pourquoi nous avons lancé et relançons la campagne pour un salaire minimum de 10 euros de l’heure, en particulier pour lutter contre l’inflation.

Le 28 avril, nous serons à Rome pour accompagner le mouvement des migrants qui se construit au niveau national contre les politiques du gouvernement Meloni, à la fois celles de l’accueil (dans le projet de loi, il y a une criminalisation des débarquements des migrants qui arrivent) mais aussi contre le contrôle du capital sur la main-d’œuvre, parce qu’il y a la partie la plus progressiste de la gauche qui ne remet pas en cause le mécanisme jusqu’au bout mais dit simplement : nous avons besoin de plus d’immigrés en Italie parce qu’il y a une pénurie de travailleurs, donc nous voulons faire venir plus d’immigrés.

Au contraire, nous disons que le mécanisme doit être remis en question à l’origine. Cela a également un lien avec les guerres, car si nous continuons à faire des guerres dans le monde entier et à détruire des pays, les habitants s’enfuiront et viendront ici ! Le 28 avril, nous essaierons de construire une mobilisation aussi large que possible avec la caractéristique importante que les protagonistes ne sont pas les Blancs, mais les immigrés eux-mêmes qui construisent ce chemin, et nous, en tant que Potere al Popolo, nous serons en soutien.

Des syndicats reprennent-ils également ces revendications ?

Sur le salaire minimum, nous essayons de faire campagne avec l’USB avec qui nous avons déjà partagé une partie de cette campagne l’année dernière, avant la chute du gouvernement Draghi.

Au sein de la CGIL, certains secteurs sont favorables, mais je dirais qu’en principe, la CGIL n’est pas favorable au salaire minimum parce qu’elle craint qu’il n’affaiblisse le pouvoir de négociation dans les négociations collectives. Elle ne soutient donc pas la proposition de salaire minimum.

Elle en parle mais avec une formule telle qu’il ne s’agit pas d’un salaire minimum. Sur d’autres questions, concernant les immigrés, d’autres organisations et associations se mobiliseront également.

A notre avis, il y a deux lignes qui se construisent au sein des mouvements d’opposition au gouvernement Meloni : un côté proche du Parti démocrate, et l’autre ligne, que nous partageons, est en autonomie politique et sociale par rapport au Parti démocrate.

Tout comme ici en France, la lutte n’est pas seulement contre l’extrême droite de Marine Le Pen, elle est surtout contre Macron et contre les réformes libérales voulues par le gouvernement Macron.

En Italie, on ne peut pas oublier que le Parti démocrate a fait des lois contre les migrants, a fait des lois contre les travailleurs. Parfois, les pires lois ont été faites par le Parti démocrate. Le Job’s act, la réforme du travail de 2015 par le gouvernement Renzi, c’est le Parti démocrate qui l’a faite. Le parti le plus pro-Otan et pro-guerre est le Parti démocrate.

Pour nous, l’objectif est de construire un camp alternatif populaire à la fois à l’extrême droite et à la gauche, si elle est encore à gauche !

A propos de l’Unione Popolare, qui est toujours en construction, que peux-tu me dire sur la poursuite de cette construction politique que vous faites aussi avec d’autres militants ?

En ce qui concerne la campagne sur le salaire minimum, qui est née avant la naissance de l’Unione Popolare, nous allons proposer qu’elle soit partagée par l’ensemble de l’Unione Popolare parce que, pour nous, il doit s’agir d’une force réelle qui sait être parmi les gens, pas seulement avec des communiqués.

En décembre, nous avons eu une assemblée nationale de l’Unione Popolare dans laquelle nous avons commencé une discussion qui se poursuivra dans les prochains mois. Nous ouvrirons également aux adhésions pour élargir le processus aux organisations collectives et aux individus et l’objectif est, d’ici l’été, de construire un autre moment d’assemblée, afin d’avancer.

Avant tout, la caractérisation se fait sur le thème de la guerre, c’est-à-dire que l’Unione Popolare est née contre l’envoi d’armes en Ukraine, et, à ce niveau, nous devons continuer et nous caractériser, à mon avis, comme la force la plus cohérente contre la guerre en Ukraine, la force qui, sur le plan social, sait être au cœur des travailleurs avec la campagne sur le salaire minimum, et en même temps embrasser les revendications des mouvements plus jeunes comme l’environnement ou la question du genre.

Propos recueillis par Ophélie Sauger