Rejets, colères, révoltes

Les développements de ces derniers jours confirment que c’est bien de la résistance des peuples, qui s’exprime de partout – notamment au Proche et au Moyen-Orient– que viendra l’issue, le cessez-le-feu et l’arrêt des massacres en Palestine.

Manifestation a Amman, en Jordanie, le 28 mars, comme depuis plusieurs jours, pour exiger la fermeture de l'ambassade Israélienne (photo Laith Al-jnaidi / Anadolu via AFP).
Par Pierre Valdemienne
Publié le 3 avril 2024
Temps de lecture : 4 minutes

Au moment où Benyamin Netanyahou confirme l’opération militaire à Rafah en dépit de l’opposition affichée par les Etats-Unis, des milliers de manifestants envahissent les rues devant la Knesset (le Parlement) à Jérusalem, dimanche 31 mars, pour exiger la démission du Premier ministre israélien et la convocation d’élections anticipées, dans l’une des manifestations les plus importantes depuis le 7 octobre, violemment réprimée par la police israélienne.

Dans la manifestation, des banderoles écrites à la main en hébreu sont brandies pour dire: « Nous en avons assez de mourir pour les colonies »  ou encore « Arrêt de la guerre ».

Les peuples se dressent contre leur gouvernement

Au même moment, à 100 km de là, une autre manifestation, cette fois-ci dans la capitale jordanienne à Amman, se tient devant l’ambassade d’Israël où des milliers de personnes se sont rassemblées contre les massacres à Gaza, malgré la répression violente et les arrestations effectuées par les forces de sécurité jordaniennes. Dans le rassemblement, des pancartes faites à la main sont brandies pour dire : « Nous ne nous arrêterons pas tant que tous les traités et accords honteux ne tomberont pas ». Nous en sommes aujourd’hui au neuvième jour consécutif de manifestations à Amman.

La veille, des manifestations ont éclaté à Ramallah en Cisjordanie, à 20 km de Jérusalem, où des centaines se sont réunis en solidarité avec Gaza pour exiger la fin immédiate du génocide en Palestine. Au même moment, des milliers se rassemblaient à Tel-Aviv pour porter les mêmes exigences qu’à Jérusalem.

Le 1er avril, des milliers d’Irakiens participent à une marche massive à Bagdad en soutien au peuple palestinien.

La veille, le Financial Times publie un article intitulé : « La stratégie israélienne de l’Arabie saoudite est bouleversée par la colère suscitée par la guerre de Gaza », ajoutant : « Les responsables saoudiens craignent que les images brutales en provenance de Gaza ne radicalisent leur jeune population et ne perturbent les plans de réforme économique et sociale ».

Les développements de ces derniers jours confirment, s’il en était besoin, que c’est bien de la résistance des peuples, qui s’exprime de partout – notamment dans la région – que viendra l’issue, c’est bien par elle que passeront le cessez-le-feu et l’arrêt des massacres.

Dans les pires conditions, bravant la répression féroce, les peuples de la région se dressent contre leur gouvernement pour exiger le cessez-le-feu et l’arrêt des massacres.

Au même moment, Emmanuel Macron en France, qui a affiché à plusieurs reprises son « soutien inconditionnel » au gouvernement israélien, y compris en livrant du matériel militaire, amplifie son offensive tous azimuts contre les droits et les acquis des travailleurs.

En France, cette politique réactionnaire est de plus en plus rejetée

Le gouvernement a en particulier dans le viseur les demandeurs d’emploi, avec la volonté assumée d’utiliser l’assurance chômage comme variable d’ajustement pour réaliser les milliards d’euros d’économies annoncés.

Cette politique réactionnaire, qui vise à justifier les coupes budgétaires et les contre-réformes qui en découlent au nom de l’« effort de guerre », est de plus en plus rejetée : après les blocages et autres opérations organisées encore actuellement par les agriculteurs – qui menacent de reprendre de plus belle à l’occasion de l’examen du projet de loi d’orientation agricole ce mercredi 3 avril en conseil des ministres – ou la grève des contrôleurs SNCF organisée en « collectifs » il y a quelques semaines, les enseignants s’organisent pour obtenir les moyens nécessaires pour exercer et combattre cette ignominie qu’est le « choc des savoirs ».

Encore ce mardi 2 avril, ils étaient des milliers, avec leurs syndicats, avec les parents, à se réunir en assemblée générale, à faire grève et à manifester, notamment à Paris en direction du ministère.

C’est dans ce contexte que se prépare la campagne aux européennes, et pour laquelle le camp macroniste est, pour le moins, inquiet.

Européennes: « Les sondages ne sont pas très encourageants » pour la liste Renaissance…

A lire le journal patronal Les Echos  (27 mars) : « Les sondages ne sont pas très encourageants »  pour la liste Renaissance menée par Valérie Hayer. Doux euphémisme… A croire que le climat nauséabond soigneusement entretenu par l’exécutif, jouant sur la peur, accusant à peu près tous ceux qui refusent les massacres en Palestine – à commencer par La France insoumise (LFI) – de faire le lit de l’antisémitisme, ne leur réussit pas vraiment…

A tel point que certains s’inquiètent même du fait que la liste du parti socialiste conduite par Raphaël Gluksmann pourrait prendre des voix à la majorité présidentielle.

« Le “petit” Glucksmann a atteint 13 % chez Ipsos. Se pourrait-il que la nouvelle donne budgétaire et son cortège de réponses impopulaires poussent dans ses bras une partie des électeurs macronistes? La fondation Jean-Jaurès l’envisage sérieusement »  (Les Echos,  2 avril).

Ce dernier, qualifié de « nouvel espoir de la gauche »  (Le Point), a fait de la « rupture avec Jean-Luc Mélenchon »  son axe de campagne. Au Parlement de Strasbourg, le député européen du Parti socialiste a voté contre la reconnaissance des actes de guerre israéliens et du nombre de victimes palestiniennes, et contre la reconnaissance du fait que les violences en Palestine sont « le fruit d’un conflit et d’une occupation qui dure depuis 56 ans, sans perspectives d’issue politique ».

La liste conduite par Raphaël Glucksmann: une énième tentative d’« union de la gauche »

S’agissant de l’Ukraine, la tête de liste socialiste aux européennes, après avoir tancé il y a un mois le gouvernement pour qu’il « passe en mode économie de guerre », a appelé, quant à lui, à acheter 800000 obus « en commun à l’échelle européenne »  et à « mobiliser l’épargne des Français » pour la guerre – il a d’ailleurs été entendu par les sénateurs, sur ce point.

En réalité, la liste conduite par Raphaël Glucksmann est une énième tentative de reconstitution de l’« union de la gauche » qui, face aux incertitudes de la situation ouverte par le rejet sans précédent de Macron, vise à se présenter comme une « alternative » pour continuer à frapper toujours les travailleurs. La tête de liste du Parti socialiste ne vient-il pas de déclarer: « Il faudra une union de la gauche après ces élections  [européennes]  mais ça ne se fera pas sur la ligne de Jean-Luc Mélenchon. »  CQFD.