Rien n’y fait…

La répression, les intimidations, les falsifications, les amalgames… Rien n’empêche les peuples du monde entier d’exprimer leur refus de la situation, leur colère.

Manifestation à New York, le 5 avril (photo John Lamparski / NurPhoto via AFP)
Par Pierre Valdemienne
Publié le 10 avril 2024
Temps de lecture : 4 minutes

Samedi 6 avril dernier, une semaine après une puissante manifestation devant la Knesset, 100 000 personnes ont manifesté dans les rues de Tel-Aviv pour exiger à nouveau la démission de Benyamin Netanyahou et la tenue d’élections anticipées.

Le même jour, des manifestations se sont à nouveau tenues dans le monde entier (Manchester, Tokyo, Sanaa au Yémen, Tanger au Maroc, Mumbai en Inde… sans oublier les manifestations quotidiennes à Amman en Jordanie qui ne cessent depuis quinze jours) en soutien au peuple palestinien, pour exiger l’arrêt des bombardements et le cessez-le-feu immédiat en Palestine.

« Oui, il y a un mécontentement croissant » (John Kirby, porte-parole de la Maison-Blanche)

Ce refus de la situation se réfracte jusque sur les gouvernements, qui sont contraints d’en tenir compte, au moins dans les déclarations. Ainsi, le président des Etats-Unis, Joe Biden, a déclaré au Premier ministre israélien que la poursuite de son soutien à l’opération à Gaza dépendrait des mesures prises pour protéger les civils palestiniens, et a appelé à un « cessez-le-feu immédiat » (4 avril). C’est la première fois que le président américain laisse ainsi entendre que les Etats-Unis pourraient poser des conditions à leur appui à Israël.

Et pourtant, les livraisons d’armes au gouvernement Netanyahou se poursuivent

Il faut dire qu’une vingtaine d’élus du Parti démocrate ont annoncé qu’ils s’opposeraient au projet de loi d’aide de 95 milliards de dollars pour Israël (mais aussi pour l’Ukraine). Trois jours plus tard, Nancy Pelosi, ancienne présidente de la Chambre des représentants et alliée clé de Joe Biden, a signé une lettre avec des dizaines de démocrates du Congrès adressée au président et au secrétaire d’Etat, Anthony Blinken, appelant à l’arrêt des transferts d’armes au gouvernement israélien (7 avril). Ce qui fait dire à John Kirby, porte-parole de la Maison-Blanche pour les questions militaires : « Oui, il y a un mécontentement croissant » .

En Angleterre, les partis politiques se déchirent sur la question des ventes d’armes à Israël : le gouvernement conservateur étudie la question de savoir si Israël enfreint ou non le droit international, ce qui interdirait de poursuivre la fourniture d’armes.

Et pourtant, les mêmes, contraints de louvoyer, dans leurs déclarations, en affirmant être pour le cessez-le-feu, continuent, dans leurs actes, à livrer des armes à Israël.

Dans le mouvement ouvrier, cette situation provoque de plus en plus de réactions : ainsi, des syndicats de différents pays en Europe ont adopté un appel qui s’adresse à l’Union européenne et aux gouvernements européens pour que soient suspendus les accords d’association avec l’Etat d’Israël et les transferts d’armement.

En Grande-Bretagne, le syndicat des fonctionnaires britanniques a déclaré qu’il « envisageait sérieusement » d’engager une action en justice pour empêcher ses membres qui supervisent les exportations d’armes vers Israël « d’être forcés de commettre des actes illégaux » .

En fin de compte, derrière l’apparence des choses, il y a la, et les réalités

Au même moment, des négociations avec les représentants américains, qataris, israéliens et du Hamas, en présence de Bill Burns (chef de la CIA), se sont ouvertes dimanche au Caire pour une tentative de parvenir à une trêve dans la bande de Gaza.

En fin de compte, derrière l’apparence des choses, il y a la, et les réalités. Haim Bresheeth, présent dans nos locaux samedi 30 mars pour tenir meeting avec d’autres contre l’antisémitisme et son instrumentalisation par les gouvernements, en a donné une idée très précise. Militant ouvrier, membre du Labour Party en Angleterre, voilà un homme qui, fidèle à ses convictions confirmées par les faits, n’a pas hésité à rompre avec son parti de toujours lorsqu’on a voulu lui faire croire que Jeremy Corbin ou Ken Loach, membres de son parti, étaient, d’un coup, devenus antisémites parce que condamnant l’infâme politique des gouvernements israéliens et de ses divers sbires.

Le courage de cet homme, et les succès remportés, en choisissant la défense des peuples, des intérêts ouvriers et de progrès contre les gouvernants et les bureaucrates de tous poils est, certes à saluer, mais surtout à méditer. C’est le sens du progrès et de l’histoire.

Déjà dans le passé, aujourd’hui dans le présent, et pour l’avenir. A l’inverse d’un Manuel Valls, pseudo-socialiste et « homme à tout faire » des tenants de l’ordre. D’un Julien Dray, de la LCR (aujourd’hui NPA) puis du Parti socialiste, et aujourd’hui factotum de Netanyahou. En passant par Jérôme Guedj, député élu grâce à la Nupes, tenant tribune avec Meyer Habib, qui ne lui paye même pas son plat de lentilles.

Nul n’est besoin de dire de quel côté nous sommes surtout lorsqu’on entend un Eric Naulleau, ami de Zemmour et compère de plateau de Pascal Praud, déclarer : « L’électorat de Jean-Luc Mélenchon est antisémite » . Il faut qu’ils soient tous bien acculés pour en arriver là. Les poubelles de l’histoire sont pleines de ces gens-là.

Haim Bresheeth sera présent le 5 mai.

 

En bref

Jérôme Guedj (député PS), lors d’un rassemblement place du Trocadéro à Paris, dimanche 7 avril, avec notamment Meyer Habib, Patrick Bruel ou encore Enrico Macias : « Si vous n’êtes pas capables d’être avec les alliés qui défendent le droit à la sécurité d’Israël, qui combattent le terrorisme islamiste, alors si vous n’êtes pas capables de faire l’union sacrée, alors vous resterez seuls ! Pour faire l’union sacrée, il faut des alliés, il faut des combattants de la liberté, pour cela il faut le faire tous ensemble. Je suis fier et heureux de me battre pour le droit à la sécurité d’Israël, de demander la libération des otages, de demander la protection des civils palestiniens. » (huées de la foule).

Post X de Manuel Bompard, député LFI (7 avril) : « Et un rassemblement qui hue “la protection des civils palestiniens”, ça ne pose de problèmes à personne ? Combien de ceux à la tribune seront interrogés pour savoir s’“ils condamnent” ? »

Julien Dray (PS) : « Normalement, on devrait tous être au côté de l’armée israélienne, non par sympathie mais parce qu’elle se bat pour la civilisation des lumières » (8 avril).

Manuel Valls (Renaissance) à Radio J (7 avril) : « Il y a eu des centaines, des milliers de morts civils qui étaient utilisés comme bouclier par l’Etat islamique à Mossoul (Ndlr : en 2016-2017, Manuel Valls était alors Premier ministre de François Hollande), du fait des bombardements de l’armée irakienne et de la coalition internationale à laquelle nous participions comme Français. »

Eric Naulleau (essayiste, ami d’Eric Zemmour) à Radio J (3 avril) : « Un jour, avec Mélenchon et LFI, ça pourrait conduire à un pogrom contre les juifs. »