Contribution au débat, entendue dans un congrès syndical
Extraits du rapport introductif du secrétaire général, Frédéric Bochard, de l’union départementale FO du Puy-de-Dôme lors de son 32e congrès.
- Actualité politique et sociale, Tribune libre
» Dans la situation où se déroule notre 32e congrès, notre banderole de congrès résume parfaitement et clairement les choses. Pour être précis, ce n’est pas un slogan inventé à l’occasion de ce congrès… Il s’agit quasiment mot pour mot du titre de la déclaration constitutive adoptée par les 1 435 délégués lors du congrès de fondation de la CGT Force ouvrière en 1948 ! Et cela reste complètement d’actualité !
C’est bien cela le syndicalisme ouvrier confédéré que nous représentons, que nous construisons et que nous défendons.
Certes c’est bien sûr le combat au quotidien pour les revendications, les petites comme les grandes… Mais c’est aussi le combat pour l’émancipation totale des travailleurs… Et c’est aussi le combat pour la liberté et pour la paix !
Nous ne devons perdre aucun de ces aspects sinon ce serait réduire et atrophier notre syndicalisme. (…)
Un congrès de résistance, de mobilisation, pour l’action syndicale de classe
Ce congrès, comme cela s’est fait dans de nombreux autres départements, est un congrès de résistance, un congrès de combat, un congrès de mobilisation, un congrès pour l’action syndicale de classe ! Et le contexte de ce congrès, c’est à la fois les déclarations de Macron, en particulier le 31 décembre, et le remaniement gouvernemental avec la nomination comme Premier ministre de l’éphémère ministre de l’Éducation, Gabriel Attal.
(…) Attal s’inscrit dans le programme annoncé par Macron le 31 décembre…
La référence continue au « réarmement de la nation » conjugué à toutes les sauces, « civique », « industriel », « économique » justifiant de nouvelles mesures et de nouvelles attaques contre les droits des travailleurs alliées à son projet avorté de conseil national de refondation n’est pas sans faire penser à un autre discours en particulier l’idée de « réarmement civique ».
En voici un court extrait : « Nous avons à restaurer la France. (…) Notre défaite est venue de nos relâchements. L’esprit de jouissance détruit ce que l’esprit de sacrifice a édifié. C’est à un redressement intellectuel et moral que, d’abord, je vous convie. Français, vous l’accomplirez et vous verrez, je vous le jure, une France neuve sortir de votre ferveur ».
C’est le discours de Philippe Pétain le 25 juin 1940.
Le « réarmement civique » n’est que le pendant actualisé du « redressement moral »… Et la « refondation » n’est que le pendant de la « restauration ».
La loi immigration une loi raciste, et aussi anti-ouvrière
(…) Le contexte, c’est aussi la loi « immigration », cette loi scélérate, xénophobe et raciste qui a été votée dans les conditions que l’on connaît. (…)
Cette loi est non seulement une loi raciste, c’est aussi une loi anti-ouvrière qui remet en cause les droits des travailleurs et les acquis démocratiques. Elle est à l’opposé des principes de solidarité ouvrière que nous défendons. Au demeurant, il faut remarquer que ce sont les mêmes, ou à peu près, qui ont organisé les rassemblements du 12 janvier prétendument contre l’antisémitisme et qui, un mois après, vote sans aucun état d’âme, une loi discriminatoire, raciste et xénophobe ! (…)
C’est pourquoi dès le vote de la loi, l’Union départementale a pris position et a appelé à participer au rassemblement à la préfecture le 18 décembre.
La solidarité entre les travailleurs, le rejet de toutes les discriminations, du racisme et de la xénophobie, c’est l’affaire du syndicalisme. En réalité, cette loi ajoutée à toutes les mesures antidémocratiques prises depuis plusieurs années (la loi « sécurité globale », la loi « anticasseurs », les restrictions à la liberté de réunion, de rassemblement ou de manifestation, la remise en cause du droit de grève…) questionne avec gravité sur l’évolution d’un État qui dérive dans une spirale autoritaire et liberticide… Plus qu’abîmée, la République est en danger et nous devons agir contre cette dérive et être là aussi à l’initiative.
Nous avons un rôle à jouer et une responsabilité à assumer
Nous ne pouvons pas être indifférents à la nature de l’État… C’est d’ailleurs affirmé dans les statuts de notre confédération, plus précisément dans le préambule des statuts : « considérant que le syndicalisme ne saurait être indifférent à la forme de l’État parce qu’il ne pourrait exister en dehors d’un régime démocratique, les syndicats Force ouvrière reconnaissent au mouvement syndical le droit, lequel peut devenir un devoir, de réaliser des rapprochements ou des collaborations en vue d’une action déterminée lorsque la situation l’exige expressément ».
Nous avons donc un rôle à jouer et une responsabilité à assumer. Nous refusons cette loi raciste, nous refusons cette dérive totalitaire et liberticide et notre responsabilité est bien d’organiser la résistance syndicale sur ces questions, en particulier pour le retrait pur et simple de cette loi et de prendre les initiatives syndicales en conséquence.
Une situation internationale particulièrement dramatique
Depuis le mois d’octobre, la situation au Moyen-Orient montre qu’un cap a été franchi… Le gouvernement israélien, avec le soutien du gouvernement français comme celui des USA, organise la destruction totale de la bande de Gaza. (…)
Là aussi il doit y avoir une réponse syndicale… C’est ce que nous avons fait le 24 octobre, en proposant aux autres organisations syndicales un rassemblement pour le cessez-le-feu.
L’appel des syndicats américains pour le cessez-le-feu est extrêmement important et l’UD FO, comme d’autres UD, l’a repris à son compte et l’a diffusé. C’est bien le rôle et la responsabilité des syndicats ouvriers d’agir sur cette question.
Nous avons obtenu un accord avec la CGT, la FSU et Solidaires qui ont repris notre proposition. Nous avons refusé de nous soumettre à l’interdiction de manifestation décidée par la préfecture – et je remercie à nouveau la confédération pour le soutien apporté – et plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés à l’initiative des organisations syndicales pour le cessez-le-feu en Palestine.
Cette déclaration des syndicats américains correspond à l’essence même du mouvement syndical. Pour rappel « le syndicalisme a pour devoir de se consacrer à la sauvegarde de la paix » (déclaration constitutive de la CGT-FO en 1948). Et également : « Nous abattrons les forces de guerre et d’agression et nous créerons un monde paix et de justice sociale » (déclaration constitutive de la CISL en 1949). Ces déclarations, c’est l’essence même du syndicalisme ouvrier… Ce sont nos principes, l’internationalisme et le pacifisme ! Là aussi, parce que c’est notre responsabilité conformément à nos principes, pour rester sur le terrain syndical, il faut l’initiative syndicale et ne pas laisser le terrain à d’autres (…). »