« C’est le moment d’y aller tous ensemble pour bloquer cette politique »

Interview d’Edeline Reix, enseignante et syndicaliste dans les Yvelines à la veille d’un appel à la grève dans la Fonction publique le 5 décembre.

Par la rédaction d’IO
Publié le 4 décembre 2024
Temps de lecture : 3 minutes
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Le syndicat majoritaire du 1er degré annonce 65 % de grévistes le 5 décembre. Peux-tu nous dire d’où vient cette grève ?

Edeline Reix : L’annonce pendant les dernières vacances scolaires des trois jours de carence et de la baisse de l’indemnisation des jours d’arrêt maladie à 90 % (au lieu de 100 % actuellement) a provoqué la colère des enseignants. Nos salaires sont indigents et n’ont pas été revalorisés malgré tous les efforts des derniers ministres pour faire croire le contraire.

Beaucoup de collègues ont du mal à boucler les fins de mois. L’inflation nous touche comme tous les travailleurs de ce pays. Si les trois jours de carence étaient mis en place, cela voudrait dire une nouvelle perte de salaire en cas de maladie. Une semaine de grippe (chose quand même courante chaque hiver quand on passe sa journée avec 30 élèves en classe) vous coûterait 300 euros !

Cette colère s’ajoute à la colère déjà existante : celle qui découle des suppressions de postes, du manque de personnel, des réformes successives dégradant nos conditions de travail… Dans mon département, plusieurs écoles seront en grève à cause de situations répétées et non réglées d’élèves en situation de handicap qui ne trouvent pas de place dans les structures spécialisées et se retrouvent en classe, avec un accompagnement de quelques heures par-ci par-là.

Une véritable maltraitance organisée ! Tout cela est fait par un gouvernement totalement illégitime. Nombre d’enseignants ont sanctionné Macron et sa politique lors des précédentes élections. Ils ont le sentiment de s’être fait voler leur vote !

Et puis il y eu aussi les propos de Sarkozy sur « les enseignants ne travaillent que 24 heures par semaine » qui ont soulevé l’indignation.

Dans ces conditions, la grève du 5 décembre s’annonce très suivie. Plusieurs écoles seront fermées et pas toujours celles qui sont les plus habituées à faire grève. Avec mon syndicat, nous tournons dans les écoles depuis plusieurs semaines pour préparer la grève. Beaucoup de collègues savent qu’une journée de grève, aussi puissante soit-elle (et tant mieux si elle l’est, évidemment) ne suffira pas et ils le disent ouvertement. Alors on discute avec eux de comment faire, des suites à donner à cette grève…

Peux-tu nous expliquer comment se prépare la reconduction de la grève?

Rien n’est simple et ne va de soi mais commencer à en discuter entre nous est déjà une première étape importante.

Aux Mureaux, nous aidons à organiser des réunions pour que les collègues puissent se réunir après le 5 décembre et décider. A Achères, les collègues ont décidé de ne pas se rendre à la manifestation jeudi, mais plutôt d’aller tracter auprès des parents d’élèves, d’aller discuter avec les collègues non grévistes dans les écoles et les établissements du 2nd degré afin qu’ils rejoignent la mobilisation. Les grévistes sont invités à se réunir avec les fonctionnaires territoriaux qui ont décidé la grève les 4 et 5 décembre devant la mairie d’Achères jeudi matin.

Mon syndicat a lancé le mot d’ordre « 3 jours de carence, 3 jours de grève » les 10, 11 et 12 décembre afin d’être aux côtés des cheminots qui, eux, appellent à une grève illimitée à partir du 11 décembre.

Le gouvernement a déclenché le 49.3 lundi après-midi et va probablement tomber suite au vote d’une motion de censure ce mercredi…

Ce serait une excellente nouvelle. Ça suscite des discussions avec des collègues qui s’interrogent. L’un d’eux me disait ce matin qu’il se demandait si la grève servait vraiment à quelque chose puisque le gouvernement allait probablement tomber.

Mais ça ne veut pas dire qu’ils vont en finir avec leur politique ! C’est justement le moment d’y aller tous ensemble pour les bloquer : les 3 jours de carence, l’abandon des 4 000 suppressions de postes dans l’Education nationale, etc. Et pour chasser Macron car c’est quand même lui le responsable de ce désastre.