Encore et toujours, la question des retraites
Comme si l’on pouvait attendre que Macron et Bayrou se décident à satisfaire les exigences de la population…
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Parmi le conglomérat de ministres démis, vomis et illégitimes qui forment le gouvernement Bayrou, il y a deux anciens premiers ministres, connus pour avoir passé en force leurs contre-réformes à coups de 49.3 : Manuel Valls et Élisabeth Borne.
Ce bras d’honneur à tous ceux qui se sont mobilisés contre les lois El Khomri en 2016 et la réforme Macron-Borne en 2023 n’a pas suscité beaucoup d’indignation de la part des principales confédérations.
Dans un communiqué du 24 décembre, tout en ayant au moins la présence d’esprit de réclamer l’abrogation de la réforme des retraites, la CGT se contente d’appeler les ministres nouvellement nommés « à prendre la mesure de la gravité de la situation et de l’ampleur des urgences sociales. »
Comme si l’on pouvait attendre que Macron et Bayrou se décident à satisfaire les exigences de la population, alors qu’au même moment les dirigeants des confédérations multiplient les appels à la responsabilité, à la stabilité et à la reprise du « dialogue social ».
François Bayrou sait combien il a intérêt à se saisir de toutes les mains tendues. « Les organisations syndicales et patronales ont écrit ensemble aux forces politiques pour dire qu’on ne pouvait pas continuer dans cette instabilité (…). C’est une lettre qui aurait dû être commentée sur vos plateaux pendant des heures ! », reproche-t-il aux journalistes de BFM-TV.
Cette lettre, à propos de laquelle Informations ouvrières s’est exprimé, outre qu’elle condamne à mots couverts la censure du gouvernement et qu’elle formule des offres de service à François Bayrou – qui, d’ailleurs, leur rend bien la pareille en validant l’accord national interprofessionnel sur l’assurance-chômage – esquive soigneusement tout contenu revendicatif – et pour cause ! C’est une lettre signée avec les organisations patronales… à commencer par l’exigence d’abrogation de la réforme des retraites.
« Reprendre sans suspendre la réforme des retraites » (François Bayrou)
C’est pourtant à nouveau cette question des retraites, toujours rejetée par l’immense majorité de la population, qui se retrouve au centre des tractations visant à éviter la censure… Lors d’une réunion à Matignon avec tous les partis politiques – à l’exception de LFI et du RN – le Premier ministre a déclaré vouloir « reprendre sans suspendre la réforme des retraites », et se donner jusqu’en septembre – désormais juin – pour faire aboutir d’éventuelles discussions, y compris sur l’âge de départ à 64 ans. En « contrepartie » de quoi, serait remise sur la table la réforme des retraites à points !
Dans ces conditions, et comprenant qu’il a plus à perdre qu’à gagner, le Premier secrétaire du Parti socialiste a dit non et a fait valoir sur RMC (25 décembre) qu’il n’y aurait pas de « pacte de non-censure ». Mais, comme le fait remarquer Le Figaro (26 décembre) : « Désormais actée, l’absence de tout “accord” avec les socialistes ne signifie pas pour autant qu’ils censureront le gouvernement au lendemain de la déclaration de politique générale. »
Gagner du temps pour éviter à tout prix une élection présidentielle anticipée : c’est ce qui anime notamment Olivier Faure, lorsqu’il réitère sa demande de « conférence de financement » de la réforme, aussitôt rejoint par Fabien Roussel (PCF).
Discussions, concertation au long terme, conférence de financement des retraites
Mêmes sons de cloches du côté des confédérations : « La conférence de financement des retraites, ça fait presque deux ans que les organisations syndicales la proposent » explique Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT. « On ne va pas se priver d’aller à la table des discussions. » répond de son côté Marylise Léon pour la CFDT. Le secrétaire confédéral FO Michel Beaugas salue pour sa part : « C’est une bonne chose que François Bayrou se rende compte qu’il y a d’autres solutions que les 64 ans. » En ajoutant : « Il faut revoir complètement la base de financement des retraites et de la sécurité sociale. »
Il faudrait donc, du point de vue des dirigeants des confédérations, entretenir l’illusion que c’est par la voie des concertations et de la « négociation collective » que l’on pourra faire avancer les revendications des travailleurs.
En même temps, tous sont lucides sur la complexité de ce « sauvetage en eaux troubles. » « On nous promet une concertation au long terme, à peu près neuf mois de discussions. La problématique, c’est que je ne sais pas si François Bayrou a neuf mois » s’inquiète le secrétaire confédéral FO. Quant à la CFDT, qui pourtant avait milité pour la retraite par points, elle préfère rester prudente : « Nous allons attendre de discuter avec François Bayrou avant de nous positionner. »
Ce qui les amène à faire tant de contorsions, c’est l’état d’esprit de l’immense majorité des salariés
Il est vrai que, comme le rapporte le journal l’Opinion (23 décembre), le climat du pays n’est plus le même qu’en 2019 : « Au début du premier quinquennat, c’était déjà compliqué et long à mettre en œuvre, mais à l’époque, le gouvernement avait une majorité absolue et du temps. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. »
En définitive, ce qui les amène à faire tant de contorsions, c’est l’état d’esprit de l’immense majorité des salariés qui n’attendent rien de ce gouvernement et qui n’ont pas l’intention de se laisser faire, en témoigne la multiplication des grèves menées notamment en cette fin d’année par les salariés et les militants avec leurs syndicats, pour se défendre contre les patrons et les gouvernements.
Ces militants et ces salariés ont aujourd’hui comme point d’appui le fait qu’il existe une force de rupture dans le paysage politique : La France Insoumise qui n’a pas renoncé au mandat populaire et qui refuse les combines de la Ve République, faisant progresser partout la conscience de millions et de millions déterminés à chasser Macron pour gagner sur leurs exigences vitales.