H, c, e, r, e, s : six lettres qui provoquent la colère des universitaires
Relayant une large pétition de 4 000 universitaires, LFI combat à l'Assemblée nationale pour la dissolution immédiate du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur(Hcéres), outil de destruction de filières entières.
- Actualité politique et sociale, Université

Depuis plus de vingt ans, l’Université et la recherche sont soumises et portent le sceau d’une dérive bureaucratique et autoritaire, qui entreprend de soumettre la connaissance aux mantras de « l’économie de l’innovation », du « transfert de compétences vers la sphère décisionnelle » et autres « critères d’employabilité immédiate ».
Une institution joue un rôle fondamental pour contrôler l’application de ces réformes et discipliner les universitaires : le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres), chargé d’expertiser les établissements, les formations et les laboratoires publics.
Le secteur privé lucratif, qui prolifère avec des cadres dirigeants nommés Martin Hirsch ou Muriel Pénicaud, est miraculeusement exempté de tout contrôle qualitatif par cette instance.
Le Hcéres se prévaut du « contrôle par les pairs » : ce sont des universitaires qui rédigent les rapports sur leurs collègues, avant d’être évalués à leur tour. Du moins en théorie. Car ce mythe a volé en éclats cet hiver, avec les résultats de la vague d’évaluations sur les universités de banlieue parisienne, du nord de la France et de l’outre-mer.
Ces résultats sont d’une violence inouïe et les rapports émettent un avis défavorable à la reconduction de licences qui accueillent parfois la moitié du vivier étudiant des universités recrutant dans les classes populaires, sur la base de critères parfois ahurissants : trop peu de séjours à l’étranger, trop de poursuite d’études en master…
Devant le choc, les langues se sont déliées : les rapports avaient été caviardés, et des avis favorables transformés en avis défavorables. C’en était fini de la présomption de sincérité sur laquelle le Hcéres s’appuyait.
Dans un contexte financier particulièrement tendu, la réaction des universitaires fut claire : plus de 4 000 signatures pour une pétition demandant la dissolution immédiate du Hcéres.
L’appui unanime du PS au gouvernement
Grâce à l’action de quelques députés, notamment le parlementaire LFI Arnaud Saint-Martin, un amendement à la « loi de simplification économique » a été adopté en commission, supprimant le Hcéres, là où d’autres entendaient supprimer des comités et agences bien plus utiles à la faveur de cette loi supposément antibureaucratique.
Aussitôt, ce fut le branle-bas de combat du côté des présidents d’universités, de la CFDT, de la Fage et de l’Unsa pour tenter de sauver le Hcéres.
Mais la suppression du Hcéres a été confirmée en plénière le jeudi 11 avril, malgré l’appui unanime du PS au gouvernement. La commission mixte paritaire tranchera, sans doute courant mai.
La suppression du Hcéres agit comme un révélateur. Les faux amis de la liberté académique se rangent tous sous la bannière d’une police politique « indépendante » et n’ont pas de mots assez durs contre les « irresponsables » qui « prépareraient le terrain du RN », pour reprendre la partition déroulée par exemple par l’ancien président du comité de soutien à Fabien Roussel en 2022, le sénateur PCF Pierre Ouzoulias, dans une déclaration où il se déclare candidat au ministère de l’Enseignement supérieur d’un hypothétique futur gouvernement de gauche.
Les masques tombent. Mais c’est une brèche sans précédent qui a été ouverte dans l’édifice autoritaire. Un mouvement de reconstruction de l’Université et de la recherche a vu le jour et ne lâchera pas l’affaire de sitôt.
La question est bien l’indépendance effective de la science ou sa sujétion à une administration aux ordres : elle intéresse tous les partisans de l’émancipation humaine, qui jugeront les uns et les autres sur la base de leurs actes.
