A propos de « l’affaire » Adrien Quatennens

A la veille de la bataille des retraites, alors que le vote « Insoumis » des huit millions ébranle tout le système du pouvoir, oblige le monarque minoritaire à dix « 49.3 » en trois mois, la colère populaire gronde.Les mises en examen pour trafic d’influence, corruption, prise illégale d’intérêts, association de malfaiteurs pleuvent sur l’entourage du président. C’est dans ce contexte que « l’affaire Quatennens » a été forgée, fabriquée : pour servir des intérêts.

Adrien Quatennens, lors d'un meeting à Lille, le 10 novembre 2021 (photo Sylvain Lefevre / Hans Lucas via AFP)
Par Michel Sérac
Publié le 30 décembre 2022
Temps de lecture : 6 minutes

L’épilogue judiciaire est maintenant connu, depuis le 13 décembre. Il est un démenti formel au lynchage médiatique d’Adrien Quatennens.

Nous conseillons vivement à nos lecteurs de regarder son avocate, Me Dousselin donner en quinze minutes sur BFM une leçon de droit (et de démocratie) à une journaliste ignorante, déconfite, pantoise, forcée de ravaler son venin1Cette séquence de BFM Story est reproduite sur le site « Féministes, pas intégristes », dans le chapitre « L’affaire Quatennens ». Nous avons reproduit un article de ce site, « Divorcer en paix » dans Informations ouvrières.. La procureure de Lille a étudié le dossier, entendu les parties, les témoins, les confidents ; les faits qu’elle a retenus, très limités, sont exactement ceux reconnus spontanément, publiquement par Adrien Quatennens, qui en avait par avance accepté la sanction. Les allégations de « violences répétées » ont été écartées par la justice… et restent propagées par des faussaires.

Au milieu des ruses, des hypocrisies, des corruptions en tous genres de la « classe politique » gangrénée de la Ve République, un représentant honnête et droit reconnaît une faute, contraire à ses principes sur les droits des femmes, et en accepte les conséquences. La voilà, l’information : cette probité est rarissime.

Voyons maintenant la « justice » de lynchage que les inquisiteurs du jour veulent substituer à la démocratie, dissimulant la chose jugée par une persécution ignoble.

Inquisiteurs de CNews

En démocratie, la proportion  des peines est essentielle au droit pénal. La terreur, le totalitarisme, opposent à l’application mesurée du droit la sauvagerie. Lorsque, pour un simple contrôle d’identité, la police tue des citoyens parce qu’ils sont noirs, le peuple américain, la jeunesse française, les démocrates se mobilisent : Black Lives Matter ! Sous Pétain, une section spéciale de magistrats guillotine des militants pour un tract distribué2Voir le film de Costa-Gavras, Section spéciale..

Pour le même « crime », ou pour le projet d’un tract, Staline envoie au goulag pour huit ans et plus ; il fixe à douze ans la peine de mort3Voir Des gamins contre Staline, Jean-Jacques Marie, Seuil..

Le Jean Valjean de Victor Hugo, pour un pain volé, est envoyé au bagne, alors que sa grande bonté est exemplaire ; de même, aujourd’hui, pour un délit mineur les racistes français, héritiers politiques du colonialisme, écoutés par le gouvernement, demandent la peine maximale d’expulsion pour un immigré.

Voici comment un justicier privé, dans le média du milliardaire Bolloré et de Zemmour, incite à l’abolition des proportions pénales, assimile insidieusement une gifle à un meurtre :

« Entre Bertrand Cantat qui exécute Marie Trintignant, il y a 20 ans, à Vilnius, et Quatennens qui bat sa femme, il y a une différence de degré, bien sûr. Quatennens n’est évidemment pas Cantat, mais au fond, il n’y a sans doute pas une différence de nature. Quatennens appartient à cette race d’hommes, jaloux compulsifs ou tyrans domestiques, qui lèvent la main sur leurs compagnes, qui ne supportent pas qu’elles leurs résistent, qu’elles s’en aillent… ». Pascal Praud, CNews, 20 septembre.

Citons en réponse un texte de cinq mille signataires, « Féministes, pas intégristes, non au lynchage ! » Il dénonce ceux qui « confisquent le féminisme » :

« Comment faire confiance à des “féministes” qui instrumentalisent la victime, en font un objet pour défendre leur cause ?

Comment faire confiance à ceux qui, oui pour le coup, banalisent le viol, les coups répétées, le féminicide, en les assimilant à une gifle ?

S’arroger le droit de parler au nom de toutes les femmes, sombrer dans un “féminisme” intégriste qui, tel un cheval de Troie, véhicule des idées des plus réactionnaires, en utilisant des méthodes s’apparentant à celles du maccarthysme, voire de l’Inquisition, à la justice expéditive des heures les plus sombres de l’histoire de l’humanité, remet en cause de fait des millénaires de lutte acharnée pour construire une civilisation la plus juste et la plus démocratique possible.

Enfin comment faire confiance à des “féministes” qui ignorent, écartent, oublient dans le meilleur des cas, la violence sociale ? »

Inquisiteurs de BFM TV

Lors de son interview sur BFMTV, le 14 décembre, après avoir répété plusieurs fois, patiemment, qu’il reconnaissait la faute et acceptait la sanction de la justice, Adrien Quatennens demande à Bruce Toussaint : « Peut-on considérer qu’une faute, car c’est une faute, caractérise un homme, ou peut le résumer ? »

Implacable, le chevalier blanc Toussaint réplique : « Oui, car par votre fonction, vous avez un devoir d’exemplarité. »

La fonction de Toussaint, quant à elle, est d’informer honnêtement les citoyens, en vérifiant les faits. Ne pas tromper ou falsifier est son devoir d’exemplarité.

Le 1er mai 2019, Toussaint ouvre le journal avec un masque tragique. Sous le titre « Manif : un hôpital pris pour cible », il annonce « l’attaque particulièrement violente » de l’hôpital de La Pitié par des manifestants. Il cite Castaner, ministre, donne la parole à Martin Hirsch, directeur de l’AP-HP, qui confirme l’horrible attentat. Toussaint suggère que l’intrusion visait un policier hospitalisé, donne la parole à un syndicaliste policier : « Les délinquants ont fait intrusion dans le service de réanimation, pour y faire quoi ? ». Toussaint « n’ose imaginer ».

Tout était faux, truqué, mensonger. C’était une provocation du ministre transformée docilement par Toussaint en « information » vérifiée. Les personnels et la CGT de La Pitié démentent toute « attaque », vidéos probantes à l’appui : c’était la nasse policière du préfet Lallement qui avait poussé et traqué dans l’hôpital les manifestants… lesquels avaient respecté les personnels.

L’exemplaire M. Toussaint rejeta courageusement sa faute calomniatrice sur la « communication du ministre ». Mais on ne saurait le résumer à cette faute. Il peut encore faire pire.

Inquisiteur Fabien Roussel

Aux côtés de dirigeants macronistes, Roussel a demandé la démission du député LFI-Nupes Quatennens, l’a calomnié en falsifiant lui aussi les faits retenus par la justice – les violences au pluriel, répétées, sont inexistantes.

C’est juste une impression, ou tous les actes de Roussel sont utiles à Macron ?

Son appui à la persécution d’Etat des citoyens musulmans (loi « séparatiste »), condamnée par la responsable PCF de la lutte contre le racisme4Voir sur la page Facebook de Mina Idir la lettre de démission du conseil national du PCF, adressée à Fabien Roussel, de la militante antiraciste : « Notre secrétaire national parle comme l’extrême droite, valide leurs propos, les reprend. », sa candidature de division, contre Mélenchon, assurant la présence au second tour de Le Pen, lui ont valu les félicitations empressées de Castaner, Blanquer, Marlène Schiappa, Finkelkraut, et autres réactionnaires5Le nombre impressionnant des images de félicitations de la droite macroniste au candidat Roussel a été compilé par un internaute sous le titre « On aime tous Fabien Roussel, surtout quand on est à LREM. ». Les militants n’étant pas tous dupes, Roussel est aussi minoritaire dans son parti que Macron dans le pays. Ce n’est pas leur seul point commun.

Juste derrière Roussel, François Ruffin estime aussi que la justice n’a pas assez puni Quatennens et demande son bannissement pour un an, avec de bien étranges références :

« Les grands hommes se construisent avec des traversées du désert, qu’il s’agisse du Christ ou du général de Gaulle. Pour moi, une année sabbatique n’aurait fait de mal à personne ». Elle ferait sûrement beaucoup de bien à Macron au moment où les militants et les travailleurs ont besoin, pour combattre sa réforme des retraites, du talent, de la combativité de Quatennens.

La lutte de classe des salariés pour défendre les retraites a-t-elle moins d’intérêt pour Ruffin que les avances de la bourgeoisie, qui lui font miroiter un « destin national », à condition de multiplier les coups de médias dans le dos contre LFI ?

Grand homme ? Le général royaliste de Gaulle acheva sa traversée du désert en profitant d’un coup d’Etat pour édicter l’actuelle constitution monarchique, fonder le régime réactionnaire dont les électeurs populaires de Mélenchon demandent l’abolition. Ceux de Ruffin aussi, non ?

Représentants du peuple et carriérisme

« L’affaire » Quatennens, fabriquée par les macronistes et les médias des milliardaires, est observée par nombre de citoyens comme un test pour leurs représentants. N’oublions pas que l’insoumission a grandi en France avec les répugnantes trahisons du quinquennat Hollande, la corruption de la « gauche » bourgeoise, devenue macroniste.

Les militants et citoyens distinguent ceux qui tiennent bon sur les principes, serrent les rangs contre l’agression, et ceux qui, par arrivisme, se ruent sur les micros du lynchage – l’occasion fait le larron.

Clémentine Autain prend dans le JDD le relais de BFMTV, de Toussaint, avec les arguties tordues d’un jésuite : « Il (Quatennens) insinue… Il enferme son épouse dans son propre récit… Il renverse les rôles, etc. ». La procureure, la justice ont-ils, oui ou non, fait leur travail sur le dossier complet ?

Jadis, lorsque les carrières pouvaient dépendre de Strauss-Kahn, féministe bien connu, Clémentine Autain sut défendre avec ardeur les droits de la défense contre le lynchage médiatique. Comme disait le spécialiste Edgar Faure, c’est le vent qui tourne, pas la girouette.

« Adrien reviens, la classe ouvrière a besoin de toi »

Concluons en nous réchauffant le cœur avec quelques-uns des centaines de messages de soutien de militantes à Adrien Quatennens, publiés avec la pétition des 5 000 déjà citée, « Non au lynchage ! Féministes pas intégristes » :

« Il n’a rien caché, c’est un homme d’honneur », « Les luttes pour le pouvoir d’achat et les retraites doivent mobiliser toute notre énergie et nous avons besoin des compétences d’Adrien », « Je trouve odieux de la part de ces femmes soi-disant féministes de salir une personne pour leurs ambitions personnelles », « Insupportable cette exécution médiatique pour une personne qui a reconnu les faits », « Je ne me sens pas représentée par des femmes comme Sandrine Rousseau, son exaltation perpétuelle, la captation de ce combat pour satisfaire ses ambitions.

C’est un combat que nous devons mener avec les hommes, pas contre les hommes », « Je suis déçue par quelques “historiques” de LFI qui, par ambition, hurlent avec les loups », « Adrien reviens, la classe ouvrière a besoin de toi ! », « Combien d’hommes politiques ont commis des actions bien plus graves et ne sont pas inquiétés ; l’acharnement contre Adrien est politique pour tenter de nuire à la FI », « Adrien Quatennens est un combattant. Bon retour au combat, Monsieur », « Il est venu le temps de la riposte, et Adrien est une des meilleures armes de la Nupes », « J’en ai assez de ces femmes qui salissent tout », « Il doit continuer à travailler pour notre peuple, on a besoin de lui. Respect, Adrien ».