Dans les caisses de retraite : agents excédés, assurés en détresse
Informations ouvrières a rencontré des agents d’une caisse régionale de retraite et de santé au travail (Carsat), alors que la « réforme » des retraites est censée entrer en application dans deux mois, le 1er septembre.

Les agents sont-ils très sollicités pour répondre sur la mise en œuvre de la « réforme » des retraites ?
Les agents sont sollicités continuellement par les assurés, que ce soit par téléphone, courrier ou mail. Notre organisme a organisé un forum ainsi qu’une opération « rendez-vous retraite » où aucun agent n’a été capable de renseigner les assurés étant donné qu’à l’heure d’aujourd’hui, la quasi-totalité des décrets d’application de la loi ne sont pas sortis, les éléments d’application ne sont pas connus.
C’est d’ailleurs les raisons qui expliquent le désarroi des collègues qui considèrent qu’ils doivent être en capacité d’informer les assurés sur leurs droits à la retraite.
Les agents n’en peuvent plus parce qu’ils ne sont pas indifférents à la situation des assurés. D’un côté, le directeur de la Caisse nationale explique à qui veut l’entendre et aux journaux qui s’en font l’écho que « tout est prêt ».
Et les agents doivent expliquer aux assurés : « Repassez dans trois mois, on ne peut rien vous dire ! » C’est honteux, disent les collègues excédés par cette situation.
Les agents ont-ils eu une formation pour répondre aux assurés ?
Les agents n’ont eu aucune formation, aucune information. Ils sont démunis face aux assurés. On ne leur interdit pas de répondre, on ne leur donne pas les moyens de répondre. Aujourd’hui, les agents ne savent rien des mesures d’application de la loi et refusent de donner ce qui ne serait qu’un point de vue personnel.
Ils ne prennent pas à la légère les renseignements qu’ils donnent aux assurés, ils voudraient pouvoir les renseigner, mais ils ne peuvent pas.
Qu’en est-il des dossiers déposés par des assurés nés en 1961 et demandant leur pension à compter du 1er septembre 2023 et les mois suivants ?
Tous les dossiers des assurés nés à partir de septembre 1961 sont massivement bloqués en attente des décrets d’application (2 seulement sont connus aujourd’hui sur les 31 prévus) et du fait de l’impossibilité, dans cette situation, de mettre à jour le traitement informatique.
Une fois encore, le directeur de la Caisse nationale annonce que « tout sera prêt mi-juillet ».
Aucun agent, aucun cadre, quel que soit son secteur professionnel, n’y croit. Les délais sont impossibles à tenir.
Même les services informatiques sollicités sur l’actualisation des logiciels nécessaires sont effrayés par les effets d’annonce et leurs conséquences.
Dans notre organisme, les employés et cadres essaient au mieux d’anticiper cette situation en préparant tout ce qui est possible sur les dossiers, mais c’est bien peu, disent-ils au regard de ce qui serait nécessaire pour éviter la catastrophe et que les retraités puissent être payés dans les temps.
Quel est le nombre de dossiers en stock dans cette situation ?
Dans notre caisse, chez nous, on estime à plus de 20 000 le nombre des dossiers en stock. Nous ne parlons là que des dossiers retraite pour les nouveaux retraités. Il faut ajouter à ce chiffre tous les dossiers des assurés aux faibles ressources devant être portés au minimum vieillesse, sans oublier les dossiers pour lesquels nous avons fait des liquidations provisoires et qui doivent être repris pour que les assurés bénéficient de la totalité de leurs droits.
Là encore, les collègues nous ont fait état de leurs inquiétudes sur le passage de ces dossiers sur le nouveau logiciel.
Quelle est la situation des services à la veille des congés d’été ?
Elle est catastrophique. Les agents ne cessent de nous dire : « Les assurés nous appellent, et nous, on ne peut pas répondre. Ils nous demandent des explications et on ne peut pas leur donner. Sans oublier tout le retard accumulé, les retraités qui devraient bénéficier de leur retraite et qui nous disent : “Je vais être expulsé, j’ai des dettes, je n’y arrive plus.” » Cette situation ne peut pas durer.