Au Bangladesh, la jeunesse se dresse de nouveau contre la politique des quotas
Depuis fin juin, à l’initiative des étudiants, des manifestations massives ont lieu à travers toutes les villes universitaires. Elles « ont commencé le mois dernier après que la Haute Cour a rétabli un système de quotas pour les emplois gouvernementaux (...). » (Reuters)
- Actualité internationale, Bangladesh

Depuis fin juin, à l’initiative des étudiants, des manifestations massives ont lieu à travers toutes les villes universitaires du pays. « Les manifestations ont commencé le mois dernier après que la Haute Cour a rétabli un système de quotas pour les emplois gouvernementaux, annulant ainsi une décision prise en 2018 par le gouvernement du Premier ministre Sheikh Hasina de l’abandonner. » (Reuters)
Après la guerre d’indépendance en 1971, la ligue Awami, organisation bourgeoise de résistance, a mis en place une politique de quotas pour accéder aux emplois publics. Les combattants reconnus pouvaient ainsi prétendre à ce type de poste à hauteur de 30 %, le reste étant réparti entre les femmes de combattants et les districts. La partie restante, d’accession au mérite, était minoritaire.
En 2012, un quota d’un pour cent pour les personnes handicapées est ajouté, portant le pourcentage total d’emplois réservés au quota à cinquante-six pour cent, contre quarante-quatre pour cent réservés au mérite.
La jeunesse, à l’avant-garde
Avec plus de 155 millions d’habitants en 2018, plus de la moitié de la population a moins de 28 ans.
En 2018, cette situation sociale avait déjà engagé les étudiants vers une forte contestation ; une circulaire gouvernementale a annulé le système de quotas pour les emplois de première et de deuxième classes.
Cependant, le 5 juin 2024, la Haute Cour a statué sur une requête déposée par le descendant d’un combattant de la liberté et six autres personnes. La Haute Cour a déclaré que la circulaire de 2018 était illégale, et les quotas ont donc été rétablis dans le recrutement public. La Cour suprême a suspendu l’ordonnance de la Haute Cour après l’appel du gouvernement.
La jeunesse en action
Comme en 2018, les étudiants manifestent, bloquent les voies de transport.
Ils sont rejoints par des jeunes lycéens et travailleurs.
L’ampleur du mouvement a très vite dépassé le gouvernement de la première ministre Sheikh Hasina, issue de la ligue Awami. Surnommée Begum of Bangladesh (princesse du Bangladesh), elle a envoyé la police, l’armée et maintenant les unités anti terroristes pour réprimer la jeunesse. Depuis 2009, les mouvements sociaux sont violemment réprimés par son régime.
Le 21, devant l’université de Begum Rokeya de Rangpur, Abu Sayed, 25 ans, étudiant au département d’anglais de l’université et l’un des organisateurs du mouvement contre les quotas, a fait face à la police qui lui a tiré dessus plusieurs balles en caoutchouc. Il est décédé suite à ses blessures. A ce jour, selon le New York Times, « plus de 100 personnes ont été tuées et plus de 1 000 blessées ».
« Razakar » : la ligue Awami responsable du chaos
Comme dans de nombreux pays, le parti de l’ordre bourgeois, ici la ligue Awami, veut maintenir la classe ouvrière et la jeunesse dans un état de soumission aux lois capitalistes. Instituant la politique des quotas pour une caste, elle l’a fait perdurer pour les descendants des combattants de 1971.
Ainsi, attisant les tensions, Sheikh Hasina a qualifié les manifestants de « razakar », un terme offensant désignant ceux qui ont collaboré avec l’armée pakistanaise en 1971 pour trahir le pays. Des manifestations denses et compactes lui renvoient le compliment.
A Dacca, la capitale, des universités sont occupées dont celles des étudiantes. La milice étudiante de la Bangladesh Chhatra League (BCL), affiliée à la ligue Awami donc à Hasani, a contribué à entretenir la terreur, en chassant à coup de lathis1Bâtons longs en bambou, arme coloniale utilisée par les Britanniques. celles qui refusent de voir leur avenir dépendre de la politique de quotas.
Le Daily Star rapporte que des agents de sécurité ont incendié au moins deux bâtiments gouvernementaux à Dacca, la capitale, dont la chaîne de télévision nationale du Bangladesh. Le gouvernement a coupé les communications, les services internet mobiles et les chaînes de télévision. Dimanche, peu d’images, si ce n’est celle des corps d’étudiants morts transportés sur les véhicules blindés de l’armée, quand il ne s’agit pas de véhicules militaires écrasant des manifestants.
Des centaines de morts, où sont les voix des grandes puissances qui donnent des leçons de démocratie au monde entier et qui continuent de saigner le pays ?
De l’autre côté de la frontière, à Kolkata, les Bengalis d’Inde ont manifesté pour que cesse la répression.