Le service médical de l’assurance maladie, un service crucial pour le droit aux soins
Ce service méconnu de la Sécu est un verrou qu'il faut faire sauter pour le gouvernement, qui veut en finir avec les indemnités journalières (IJ, versées en cas d’arrêt maladie) et le remboursement à 100 % des soins pour les maladies graves.
- Actualité politique et sociale, Sécurité Sociale

Le jeudi 3 octobre 2024, le personnel des services du contrôle médical de l’assurance maladie était en grève à l’appel des syndicats CFE-CGC, CGT et FO. Des rassemblements étaient appelés partout en France et devant la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) pour les agents de la Direction régionale du service médical (DRSM) d’Île-de-France.
La grève était majoritaire et près de 200 agents étaient rassemblés devant le siège de la Cnam, à Paris. Le refus de voir le service médical disparaître était la raison de cette mobilisation massive.
En effet, dans la nuit du 18 septembre 2024, un mail a été adressé aux représentants du personnel dans lequel un document de 11 pages annonçait l’absorption des DRSM dans les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) à compter d’avril 2025.
Une violence inouïe : c’est donc par mail que l’ensemble du personnel des DRSM a reçu cette information1Surtout dans un contexte où la convention d’objectif et de gestion (COG) de la branche maladie 2023-2027 (que nous combattons et dont nous exigeons l’abandon au même titre que les projets de loi de financement de la Sécurité sociale) ne mentionnait pas ce projet..
Pourquoi une telle précipitation et une telle brutalité ? La raison se trouve dans la volonté du gouvernement et du patronat d’en finir avec la Sécurité sociale de 1945 : le service médical de la Sécurité sociale est un obstacle à l’aboutissement de leur plan.
Le personnel du service médical, en se mobilisant pour la défense des DRSM, défend la Sécurité sociale de 1945 et donc les assurés sociaux.
Tout le monde connaît la Sécu, les ordonnances de 1945 (4 et 19 octobre), mais beaucoup moins comment sont organisées la Sécu et notamment la branche maladie.
La seule boussole du service médical est l’état de santé de l’assuré
Lorsque les premiers centres de Sécu ont ouvert, les premières indemnisations ont eu lieu. Le personnel qui était aux débuts de la Sécu purement administratif, s’est retrouvé en difficulté dans la gestion des prestations médicales. Il subissait notamment la pression des patrons qui n’hésitaient pas à remettre en cause les arrêts maladie des travailleurs.
C’est dans ce contexte que le 30 avril 1968, un décret portant création du service médical de la Sécurité sociale fut publié afin de garantir aux assurés leurs droits en matière de prestations maladie.
Et depuis, l’assuré est protégé en cas de maladie par le service médical, qui est indépendant des CPAM.
La seule boussole du service médical est l’état de santé de l’assuré. C’est tout l’inverse des CPAM qui paient les prestations et subissent la pression du budget.
C’est le service médical qui donne son avis, ensuite ce sont les CPAM qui règlent les prestations.
Un exemple : dans le cadre d’une affection de longue durée (ALD : maladie grave ou chronique, dont les soins sont remboursés à 100 % par la Sécurité sociale), le service médical, se basant sur les rapports médicaux de l’assuré, octroie la prise en charge d’un assuré si celle-ci est médicalement justifiée. Par exemple, le service médical ne va pas refuser la prise en charge d’un assuré atteint d’un cancer ou d’un diabète sous le prétexte que le directeur de la Cnam estime qu’il y a trop de malades dans le pays.
Même chose pour les arrêts maladie : le service médical peut vous contrôler, mais dans l’écrasante majorité des cas, les arrêts de travail sont justifiés médicalement, contraignant les CPAM à indemniser. Cela est dû au fait de l’indépendance du service médical. Ça n’a rien à voir avec les médecins envoyés par l’employeur et payés 160 € pour passer à votre domicile pour vous forcer à reprendre le boulot ! Quand on est indépendant du payeur, on est indépendant dans les décisions !
Pour le gouvernement, un verrou à faire sauter
Mais pour le gouvernement, qui veut en finir avec les indemnités journalières (IJ, versées en cas d’arrêt maladie) et les ALD, l’indépendance du service médical pose problème et il faut liquider ce rempart pour les assurés !
C’est pour préserver cette indépendance indispensable aux assurés que les agents du service médical se sont massivement mis en grève le 3 octobre dernier avec l’exigence de retrait du projet de destruction du service médical.
En effet, les agents du service médical savent mieux que quiconque ce que signifierait le rattachement aux CPAM.
Les collègues ont pour beaucoup l’exemple de l’assurée de l’Allier qui s’est vu refuser la prise en charge par sa CPAM de son traitement contre le cancer parce qu’elle ne prenait pas les génériques. La presse s’en est même saisie durant l’été.
Le service médical de cette assurée a reconnu son cancer comme ALD, mais, malheureusement, le service médical n’intervient pas sur les traitements médicaux, c’est la CPAM qui rembourse les médicaments. Résultat : l’assurée a eu un refus de remboursement de ses médicaments.
Vous voyez ici le résultat quand la CPAM a la main sur une partie du traitement : c’est le médicament générique ou rien, alors que, médicalement, les génériques lui sont déconseillés. Demain, si les CPAM prennent le contrôle des DRSM, c’est peut-être l’hospitalisation et les chimiothérapies qui seront refusées aux assurés, budget oblige !
Nous continuerons de vous donner les éléments dans les prochains numéros d’Informations ouvrières car dans un contexte où le gouvernement veut détruire la Sécu de 1945, le combat pour la défense du service médical est central !
