« Ici, en Grèce, la pauvreté est extrême. C’est une évidence pour nous d’être contre la guerre »

« Depuis que la guerre a éclaté en Ukraine, les jeunes en Grèce ont participé aux manifestations contre la guerre, en général convoquée justement par les organisations de jeunesse. » La parole à Nikos Sakalis, membre du comité central des Jeunes pour la libération communiste (NKA).

Manifestation étudiante contre la police universitaire, le 20 octobre à Athènes (Photo AFP).
Par Nikos Sakalis
Publié le 3 décembre 2022
Temps de lecture : 3 minutes

Ici, pour nous, c’est une évidence d’être contre la guerre. Et nous comprenons que cette guerre – qui a été provoquée par la Russie – sert aussi des centres impérialistes et qu’il y a des intérêts en conflit direct avec l’Otan. En Grèce, le sentiment contre l’Otan est très fort. On peut dire qu’il est dans nos veines.

Nous avons connu la junte militaire. Nous savons ce que veut dire pour un peuple, pour la jeunesse de vivre l’oppression des Etats-Unis et de l’Otan.

Il y a donc comme un réflexe d’être contre les guerres et toutes les interventions des Etats-Unis, contre l’Otan, où que ce soit dans le monde. Depuis la révolution contre la junte militaire, en Grèce nous avons gardé cette « tradition » de lutter contre la guerre impérialiste.

Contre la guerre sans soutenir ni Poutine, ni l’Otan

C’est ce que nous vivons tous les jours en ce moment même avec les menaces de conflit entre la Grèce et la Turquie. Donc le sentiment profond de la jeunesse contre la guerre s’exprime en particulier dans le soutien au mouvement contre la guerre, contre l’Otan et contre les bases militaires de l’Otan.

Pour notre part – et pour résumer –, on peut dire que nous sommes contre la guerre sans soutenir ni Poutine, ni l’Otan. D’ailleurs, on ne croit pas vraiment que dans la population la question soit d’être pro-Otan ou pro-Ukraine. C’est plus simple que ça : la guerre continue et la crise économique avec elle. Pour nous, cela démontre la responsabilité des Etats-Unis dans la situation.

Une nouvelle phase de la guerre sociale

Et nous sommes confrontés aujourd’hui à une nouvelle phase de la guerre sociale. Au sein de la jeunesse, le mouvement pour le changement n’est pas massif mais il est bien réel. La jeunesse s’est levée en Grèce pendant la pandémie et le confinement parce que le gouvernement en a profité pour mettre en œuvre une réforme de privatisation sauvage des universités. Et c’est avec cette réforme qu’il a instauré les polices universitaires.

Il y a eu des grèves, des manifestations massives et des occupations pendant les mois les plus durs du confinement.

Les jeunes sont conscients que ce système ne marche pas, qu’il faut que ça change. Mais le sentiment général c’est que voter Tsipras ou Syriza aux prochaines élections (elles doivent avoir lieu en 2023, sans qu’une date ne soit pour le moment arrêtée, Ndlr) ne va rien changer.

Combattre la politique actuelle pour vivre mieux

Une partie importante de la jeunesse n’est plus convaincue de la possibilité que la situation s’améliore. On voit bien que pour pouvoir enfin vivre mieux, il faut combattre la politique actuelle. Sur tous les terrains : l’éducation, le logement, le travail, etc.

Rien ne va et il n’y a pas de confiance dans les « grands partis ». La répression est brutale, en particulier contre les jeunes, et tout le monde est convaincu qu’avec n’importe quel gouvernement, ça va continuer comme ça.

Combattre malgré la répression violente

Donc il faut résister. Et malgré la police, les jeunes sont là. Par exemple, on était très nombreux dans les cortèges lors de la dernière grève générale du 9 novembre. On n’avait pas vu ça depuis les grands mouvements de 2012. On peut réellement dire que les jeunes sont persécutés par la police, mais qu’on est toujours là. On continue.

Ici, je peux vous dire que personne n’aime sa vie.

Tout le monde est à bout. Les conditions sont très difficiles. La pauvreté est extrême.

Le Premier ministre a prétendu la semaine dernière que face à la crise de l’énergie, la Grèce n’avait à craindre ni pénurie de gaz, ni d’huile parce que la production de Crète pourrait couvrir tous nos besoins et y compris pourrait en exporter à toute l’Europe ! Voilà, c’est ce genre d’inepties qu’on entend tous les jours…

Nous organiser nous-mêmes

A l’époque nous n’avons pas soutenu Syriza parce que, pour nous, un gouvernement qui est dans l’Union européenne, qui paye la dette, qui soutient l’Otan ne peut pas changer les choses. Nous ne voulons pas revivre la même erreur.

Nous voulons nous organiser par nous-mêmes, pour nos droits, et nous pensons que pour cela il faut lutter contre le système capitaliste.