Débat : « Pour la paix en Ukraine »

Une discussion passionnante organisée par le media en ligne « Hors-Série ».

Le débat de 75 minutes peut être visionné sur www.hors-serie.net (abonnement mensuel sans engagement de 3 euros)
Par Yan Legoff
Publié le 27 avril 2023
Temps de lecture : 3 minutes

Mis en ligne, le 22 avril, le débat est animé par Judith Bernard, avec la participation de : Isabelle d’Artagnan, historienne, membre de l’institut La Boétie et signataire de l’appel « Halte à la guerre ! » ; Jérôme Legavre, député de La France insoumise et membre du Parti ouvrier indépendant ; Stathis Kouvélakis, philosophe et membre de la rédaction de Contretemps. Une discussion passionnante.

Judith Bernard, après avoir, entre autres, présenté l’appel « Halte à la guerre ! », lance la discussion

« Il est à peu près impossible, constate-t-elle, d’argumenter en défaveur de l’envoi des armes en Ukraine sans être aussitôt accusé de complicité avec l’ennemi, Poutine en l’occurrence. Et chacun est sommé de se ranger sans discussion derrière la stratégie d’une surenchère guerrière. C’est une sorte de nouvelle union sacrée qui semble prendre forme, de sinistre mémoire. »

Jérôme Legavre approuve, et nuance sur un point : « Cette union sacrée, à cette étape, n’est pas réalisée. » Il rappelle l’abstention du groupe LFI à l’Assemblée nationale, le 30 novembre dernier, sur une résolution de soutien aux envois d’armes en Ukraine et au cadre de l’Otan. Une résolution que les Insoumis avait qualifiée de « belliciste » et à laquelle Jérôme, après s’en être expliqué avec ses camarades députés et avec leur accord, avait pour sa part voté contre.

« Dire non (à l’envoi des armes), ce n’est pas facile, ça a l’air d’abandonner le peuple ukrainien à son triste sort, envahi par un agresseur inqualifiable », observe Judith Bernard. « Pas du tout », répond Stathis Kouvélakis. « A ma connaissance, personne n’avait demandé d’envoyer des armes à Saddam Hussein pour lutter contre l’invasion de l’Irak par l’impérialisme américain, absolument injustifiable, qui s’est faite sur la base d’un mensonge absolument colossal qui était celui des armes de destruction massive. »

Et d’ajouter : « Pas besoin d’être un grand marxiste pour comprendre que le régime de Zelensky représente des intérêts oligarchiques, que c’est un régime extrêmement corrompu », comme l’avait établi des classements internationaux.

Stathis Kouvélakis poursuivra plus tard : « On ne va quand même pas me dire que Zelensky a quelque chose de comparable avec les républicains espagnols antifascistes ou avec Hô Chi Minh… C’est le comble du ridicule ! »

L’Otan, un rempart de la démocratie ?

Les débateurs sont aussi abondamment revenus sur le rôle de l’Otan (« le bras armé de l’impérialisme américain », résumera l’un d’eux) dans les guerres présentes et passées, l’Otan étant honteusement présentée par la propagande officielle comme un rempart de la démocratie, alors qu’elle a accueilli en son sein des gouvernements dictatoriaux.

Isabelle d’Artagnan a, dans cette discussion, livré des éléments historiques très intéressants sur les conséquences de l’effondrement de l’URSS, la « mise en tension nationaliste » de nations entières (en Ukraine bien sûr, mais aussi en Géorgie par exemple) par les débris concurrents de la bureaucratie. A été aussi pointée la responsabilité particulière de l’Union européenne avec un accord d’association avec l’Ukraine en 2014 qui mit le feu aux poudres et qui, résume Judith Bernard, visait « à faire des Ukrainiens une main-d’œuvre à bas coût pour l’industrie européenne ».

Jérôme Legavre approuve.

« On ne peut pas séparer la tragédie qu’on connaît d’un contexte de privatisation et de pillage. Poutine et Zelensky ont un point commun : tous deux sont les héritiers d’une caste bureaucratique, stalinienne, qui a liquidé les conquêtes de la révolution d’octobre 1917. Au compte de qui et pour les intérêts de qui ? »

Les débatteurs en donneront plusieurs exemples, en Russie, bien sûr, et en Ukraine, avec la prise de contrôle des vastes et fertiles terres agricoles ukrainiennes par des multinationales, la liquidation par Zelensky du Code du travail à l’été 2022 (« on peut dorénavant travailler jusqu’à 80 heures par semaine en Ukraine », précise Isabelle d’Artagnan).

Les conséquences de « l’économie de guerre »

L’augmentation énorme des dépenses militaires par le gouvernement Macron et par tous les autres gouvernements en Europe a aussi été largement expliquée et dénoncée. L’« économie de guerre » devient partout la doctrine officielle. La conséquence : ces mêmes gouvernements s’en prennent brutalement aux services publics, à la protection sociale collective (retraites, hôpitaux publics, etc.) et aux conditions mêmes d’existence de millions qui, en France, en sont réduits à devoir sauter des repas !

Isabelle d’Artagnan insiste aussi sur un autre aspect de cette marche à la guerre : « la militarisation de la jeunesse avec le SNU ».

A aussi évoquée l’initiative de paix négociée proposée par le président brésilien Lula.

Stathis Kouvélakis a pointé la nécessité, malgré les obstacles politiques, de « travailler dans le sens d’une mobilisation populaire », de « prendre des initiatives pour construire ce camp de la paix », en prenant pour exemple celle initiée, en Allemagne, par la députée Sahra Wagenknecht et la militante féministe Alice Schwarzer…

Impossible de restituer dans cet article la totalité de cette discussion et des arguments échangés. Une émission à voir absolument !